louispascal a écrit: Dans le fond, cette célèbre controverse peut être vue comme une lutte de pouvoir entre Dominicain et Jésuites.
J’ai du mal à voir ce qui vous fait soutenir cela. Pour commencer, Las Casas lui-même est Dominicain. Qu’est-ce qui vous fait penser qu’une lutte entre ces deux ordres intervient dans ce débat ?
Le fond, comme le précisait Eunomia, c’est la justification de la conquête. Avant même la controverse, cette justification se faisait de deux façons :
• Par la théorie de la non-possession qui postulait que la terre des Indes n’appartenait pas aux Indiens et était donc à prendre par les Espagnols (cf. le
Requierimento)
• Par la théorie de la dépossession qui postulait que cette terre appartenait bien aux Indiens, mais qu’il était possible de les en déposséder selon certaines circonstances qui permettent le déclenchement d’une "guerre juste". (cf. Francisco de Vitoria,
De indis).
Là-dessus, nos deux protagonistes vont se positionner de la façon suivante :
• Sepulveda propose une approche que l’on pourrait qualifier d’impérialisme humaniste en se basant, entre autre, sur l’un des arguments de Vitoria : pour faire simple, il convient d’asservir les Indiens pour leur propre bien, pour les faire sortir de la barbarie ;
• Las Casas conteste les visées impérialistes développées par Sepulveda, mais ce faisant il doit marcher sur une corde raide, coincé entre des intérêts impérialistes faciles à comprendre au sein même de la couronne et l’impossibilité de renier frontalement les visées humanistes développées par Sepulveda.
Ce positionnement confère à ce texte une actualité assez savoureuse…
Concernant la question de l’âme des Indiens, il me semblait que Lévi-Strauss mentionnait quelque chose sur ce sujet dans Race et histoire, j’ai retrouvé le passage :
Claude Lévi-Strauss - Race et histoire a écrit: Dans les Grandes Antilles, quelques années après la découverte de l’Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d’enquête pour rechercher si les indigènes possédaient ou non une âme, ces derniers s’employaient à immerger des blancs prisonniers afin de vérifier par une surveillance prolongée si leur cadavre était, ou non, sujet à la putréfaction.
Malheureusement, je n’ai aucun renvoi vers une référence concernant ce passage.