BOUDOU a écrit:aliochaverkiev a écrit:le judaïsme va regarder la valeur sociale de l'acte sans s'interroger outre mesure sur la motivation personnelle de l'individu. Il semble que le catholique ne puisse pas penser que la motivation de l'individu soit "belle", non, il faut qu'il la dévalorise sans cesse
Votre commentaire est très intéressant. La question du jugement de l'intention chez les chrétiens vs. juifs est discutée par Pierre Abélard (Conférences. Dialogues d’un philosophe avec un juif et un chrétien. Connais-toi toi-même). Pour les chrétiens il est impossible de penser la notion aristotélicienne d'une forme d'égoïsme vertueux (lire ici), comme c'est le cas chez Nietzsche, dans le bouddhisme où dans le judaïsme - sans verser dans l'antisémitisme qui voit le juif profane assoiffé d'argent.
Bonjour,
Cette discussion me rappelle un passage du livre de Jean Staune, Notre existence a-t-elle un sens ?
Il s'agit de l'expérience de Libet, cette fameuse expérience où il apparaît que, lorsque nous prenons consciemment une décision, en fait cette décision est déjà prise en nous, dans l'inconscient, avant même donc que nous en ayons conscience (expérience très intéressante qui bouscule totalement les représentations de ceux qui mettent le "moi" comme le "commandant" de l'esprit, mais qui ne bouscule pas du tout ceux qui ne s'identifient pas avec leur "moi" mais avec la totalité de leur psychisme, inconscient compris). Si vous ne connaissez pas cette expérience, faites des recherches sur internet.
Donc Staune rencontre Libet et ce dernier lui dit :
"Mon expérience est plus en faveur de l'éthique juive que de l'éthique chrétienne.
- Pourquoi ? répond Staune.
- Parce que pour les chrétiens, on a péché dès lors que l'on a eu une mauvaise pensée. Mon expérience montre que c'est trop demander à l'homme que de contrôler des choses qu'il ne peut contrôler [puisque la pensée se forme avant même que nous en ayons conscience]. Mais en revanche on est responsable de ses actes. Pour l'éthique juive on est coupable non à cause des pensées que l'on peut avoir mais seulement si l'on a mal agi".
Cela paraît anodin comme différence, dans l'éthique, mais ça ne l'est pas du tout. Le catholique (je préfère dire le catholique plutôt que le chrétien car je ne connais pas bien le protestantisme) va toujours aller fouiller dans les motivations de l'autre (même lorsque l'autre accomplit un acte social créatif et positif), ce que ne fera pas l'Israélite. Et ce qu'il y a d'étonnant, c'est que même ceux qui sont élevés dans l'athéisme reproduisent les habitudes de pensée des catholiques, où l'on voit qu'une religion, même morte dans certains milieux, continue de formater les esprits (c'est le mystère de la transmission "émotionnelle" qui fait que l'on transmet beaucoup plus qu'on ne le croit).