Parousia a écrit: Il me semble que Platon donne des chiffres dans Les Lois (737d-738) en partant d'un effectif de 5040 citoyens
Pour être tout à fait exact, il parle de lots et de familles, pas de citoyens. Il refuse que la cité dépasse 5040 familles, qui ne doivent pas trop multiplier leurs membres ; si et quand c'est le cas, l'excédent de population doit être envoyé dans une colonie.
Basicglad, vous trouverez tout ça dans le livre V des
Lois. Voici deux traductions (Cousin et Chambry) de deux des principaux passages concernés :
CHAMBRY
D'abord, que nos citoyens partagent entre eux la terre et les maisons, et qu'ils ne cultivent pas le sol en commun, puisque, comme il a été dit, ce serait trop demander à des hommes nés, nourris et élevés comme ils le sont actuellement. Mais en tout cas qu'ils fassent ce partage dans la persuasion que chacun doit considérer le lot qui lui est échu comme lui étant commun avec la cité tout entière et que, la terre étant sa patrie, il doit la soigner avec plus d'attention que les enfants ne font leur mère, d'autant plus qu'elle est déesse (56) et qu'à ce titre est elle la maîtresse de ses habitants, simples mortels se. Ils doivent avoir les mêmes sentiments à l'égard des dieux et des démons du pays. Et pour que cet arrangement se perpétue dans l'avenir, il faut que les citoyens se mettent encore dans l'esprit que le nombre des foyers que nous avons fixé actuellement doit rester toujours le même et ne doit être ni augmenté, ni diminué. Voici comment on pourrait le maintenir fermement dans n'importe quel État. Chaque possesseur de lot ne laissera jamais comme héritier de sa maison qu'un seul de ses enfants, celui qu'il préférera, et le substituera à sa place pour prendre soin des dieux, de sa famille, de sa patrie, des vivants et des morts. S'il a plusieurs enfants, il établira les filles conformément à la loi qui sera portée plus tard ; pour les garçons, il les donnera comme fils à ceux de ses concitoyens qui n'auront pas de fils, particulièrement à ceux qui l'auront obligé. S'il n'a d'obligation à personne, ou si chacun des citoyens a plusieurs enfants, femelles ou mâles, ou si, par suite de stérilité, il en manque, dans tous ces cas, le magistrat le plus élevé en dignité que nous aurons institué examinera ce qu'il faut faire de ceux qui sont en surnombre ou pour remplacer ceux qui manquent, et il prendra les mesures les plus propres à maintenir toujours exclusivement le nombre de cinq mille quarante. Il y a pour cela plusieurs moyens. On peut, en effet, arrêter la génération quand elle est trop abondante, ou, au contraire, apporter tous ses soins et ses efforts à accroître la quantité des naissances par des distinctions honorifiques et par des flétrissures et des remontrances que les vieillards feront aux jeunes gens. Nous atteindrons ainsi le but que nous avons dit.
Enfin s'il devient absolument impossible de maintenir toujours le nombre de cinq mille quarante familles et que l'amour entre ceux qui cohabitent ensemble produise une trop grande affluence de citoyens, en ce cas embarrassant, nous pouvons recourir à l'ancien expédient dont nous avons parlé à plusieurs reprises, qui est d'envoyer dans une colonie avec des témoignages réciproques d'amitié ceux dont il paraîtra bon de se défaire. Si, par contre, il survient un flot qui apporte avec lui un déluge de maladies, ou une guerre qui détruise la population, et que le nombre des morts la rende très inférieure au chiffre que nous avons fixé, il ne faut pas, si on le peut, y introduire des citoyens qui n'ont reçu qu'une éducation bâtarde. Mais, comme ait dit, Dieu lui-même ne saurait faire violence à la nécessité.
COUSIN
D’abord, que nos citoyens partagent entre eux la terre et les habitations, et qu’ils ne labourent point en commun, puisque, comme il a été dit, ce serait en demander trop à des hommes nés, nourris et élevés comme ils le sont aujourd’hui. Mais que dans ce partage chacun se persuade que la portion qui lui est échue n’est pas moins à l’État qu’à lui, et que la terre étant la patrie, il faut l’honorer plus que des enfans n’honorent une mère, d’autant plus qu’elle est une divinité, et à ce titre souveraine de ses habitans, qui ne sont que des mortels[3]. Qu’ils aient les mêmes sentimens de vénération pour les dieux et les démons du pays ; et, afin que ces sentimens se conservent toujours dans leur cœur, on aura grand soin de ceci, que le nombre des foyers, tel que nous l’avons fixé, soit toujours le même, sans augmenter ni diminuer. Et le moyen qu’il en soit constamment ainsi dans toute la cité, c’est que chaque père de famille n’institue héritier de la portion de terre et de l’habitation qui lui est échue qu’un seul de ses enfans, celui qu’il jugera à propos, le substituant à sa place pour s’acquitter après lui des mêmes devoirs envers les dieux, sa famille, sa patrie, les vivans et les morts. Ceux qui auront plusieurs enfans, placeront leurs filles suivant les dispositions de la loi que nous porterons dans la suite ; pour les garçons, ils les céderont à ceux de leurs concitoyens qui n’auraient point d’enfans mâles, à ceux particulièrement auxquels ils voudraient témoigner leur reconnaissance. Faute d’un pareil motif, ou si le nombre des filles ou des garçons était trop grand dans chaque famille, ou si au contraire, par l’effet d’une stérilité générale, il était trop petit, dans tous ces cas le plus grand et le plus élevé des pouvoirs que nous établirons sera chargé de prendre des mesures relativement à cette augmentation ou diminution de citoyens, et de faire en sorte qu’il n’y ait jamais ni plus ni moins de cinq mille quarante familles.
CHAMBRY
Après la répartition en douze parties que nous avons proposée, il nous faut voir les nombreuses subdivisions que chaque partie comprend en elle-même et celles que comportent et qu'engendrent à leur tour ces subdivisions, jusqu'à ce que nous ayons épuisé le nombre de cinq mille quarante.
COUSIN
Maintenant, après avoir admis cette division générale en douze parties, tâchons de voir comment ces douze parties ont sous elles un grand nombre de subdivisions, et celles-ci d’autres encore qu’elles engendrent, jusqu’à ce que nous ayons épuisé le nombre de cinq mille quarante.
C'est le nombre en lui-même qui compte ; peu importe le nombre exact des citoyens, il faut exploiter le nombre. De toute façon, pour une cité idéale, c'est le nombre 12 (et le 24) qui revient le plus souvent.
Deux articles que je vous laisse lire :
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pop_0032-4663_2002_num_57_2_7340
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pop_0032-4663_1951_num_6_2_2484