Bonjour,
je me permets de vous présenter une réflexion succincte, car reprenant une réponse rapide que j'avais adressée à ce sujet : http://www.forumdephilosophie.com/t3021-nomos#24497
Aussi me pardonnerez-vous le manque de développement dans ce qui suit.
Si l'on se penche sur le couple physis-nomos (on pense à l'opposition entre droit naturel et droit positif, mais aussi entre nature et culture), l'alternative ne paraît-elle pas trop simple ? En effet, si la nature réfère à une idée d'ordre et de hiérarchie (cf. la définition et la critique qu'en formule Clément Rosset dans l'Anti-nature), s'intéresser au nomos revient à déconstruire une telle notion d'ordre.
Par définition, le nomos recouvre le domaine purement humain de la législation, affaire d'us et de coutumes. Ceci est soumis à la culture, à ses valeurs, à leur histoire. La conception du monde et de la nature a elle-même beaucoup évolué, tout autant que les lois et les normes.
Au fond, le préjugé serait de considérer qu'il y aurait une norme transcendante immuable, anhistorique, pré-existante et prééminente, un canon sur lequel le droit devrait se régler, par exemple en appuyant la légitimité dudit droit sur une imitation de la nature, conçue comme principe supérieur d'où tout découlerait. Je pense à l'analogie entre la cité et le cosmos chez les Grecs, notamment Platon, où le microcosme est à l'image d'un ordre plus grand et les relations censées être harmonieuses, adaptées au modèle - le microcosme reflet du macrocosme.
Or ce que l'on découvre, c'est que le nomos, produit de la législation humaine, n'est pas seulement opposé à la nature. Bien plus, il crée un autre ordre, tout en étant en réalité à l'image de la physis (et réciproquement). Dans les deux cas, il y a en effet une activité créatrice de formes nouvelles, une nature naturante aussi bien que la loi est ce par quoi la société s'auto-institue.
Dès lors, je conclus à ce qu'une étude du droit permet une approche ontologique du monde. Cependant, un doute persiste : peut-on s'arrêter là ? Qu'est-ce qui distingue encore nature et loi ?
Il me semble qu'il faut inverser la signification originelle des termes : peut-être faut-il voir dorénavant la physis (et c'est une de ses définitions, bien que la moins employée, ne relevant pas du sens commun) comme domaine de la nécessité, certes, mais tout autant du hasard, car elle est un pur Sans-Fond, un chaos (Castoriadis), une "absence d'ordre" (je cite Euterpe), an-archie, puissance créatrice déchaînée et incontrôlable. En revanche, le nomos est le domaine réservé aux hommes. A l'inverse de la physis, il s'agit de créer un ordre artificiel et viable, bref une nature (cf. ce que Clément Rosset dit de Machiavel dans l'Anti-nature, mais aussi Castoriadis), un monde habitable car ordonné, régulier. En ce sens, il s'agit du domaine de la liberté humaine (soit sa créativité propre, l'imposition de sa propre nécessité à celle de la nature ; cf. la création de formes sociales déterminant le type d'un individu dans une société donnée). Cela passe notamment par l'ob-ligation, enchaînant des causes et des effets.
je me permets de vous présenter une réflexion succincte, car reprenant une réponse rapide que j'avais adressée à ce sujet : http://www.forumdephilosophie.com/t3021-nomos#24497
Aussi me pardonnerez-vous le manque de développement dans ce qui suit.
Si l'on se penche sur le couple physis-nomos (on pense à l'opposition entre droit naturel et droit positif, mais aussi entre nature et culture), l'alternative ne paraît-elle pas trop simple ? En effet, si la nature réfère à une idée d'ordre et de hiérarchie (cf. la définition et la critique qu'en formule Clément Rosset dans l'Anti-nature), s'intéresser au nomos revient à déconstruire une telle notion d'ordre.
Par définition, le nomos recouvre le domaine purement humain de la législation, affaire d'us et de coutumes. Ceci est soumis à la culture, à ses valeurs, à leur histoire. La conception du monde et de la nature a elle-même beaucoup évolué, tout autant que les lois et les normes.
Au fond, le préjugé serait de considérer qu'il y aurait une norme transcendante immuable, anhistorique, pré-existante et prééminente, un canon sur lequel le droit devrait se régler, par exemple en appuyant la légitimité dudit droit sur une imitation de la nature, conçue comme principe supérieur d'où tout découlerait. Je pense à l'analogie entre la cité et le cosmos chez les Grecs, notamment Platon, où le microcosme est à l'image d'un ordre plus grand et les relations censées être harmonieuses, adaptées au modèle - le microcosme reflet du macrocosme.
Or ce que l'on découvre, c'est que le nomos, produit de la législation humaine, n'est pas seulement opposé à la nature. Bien plus, il crée un autre ordre, tout en étant en réalité à l'image de la physis (et réciproquement). Dans les deux cas, il y a en effet une activité créatrice de formes nouvelles, une nature naturante aussi bien que la loi est ce par quoi la société s'auto-institue.
Dès lors, je conclus à ce qu'une étude du droit permet une approche ontologique du monde. Cependant, un doute persiste : peut-on s'arrêter là ? Qu'est-ce qui distingue encore nature et loi ?
Il me semble qu'il faut inverser la signification originelle des termes : peut-être faut-il voir dorénavant la physis (et c'est une de ses définitions, bien que la moins employée, ne relevant pas du sens commun) comme domaine de la nécessité, certes, mais tout autant du hasard, car elle est un pur Sans-Fond, un chaos (Castoriadis), une "absence d'ordre" (je cite Euterpe), an-archie, puissance créatrice déchaînée et incontrôlable. En revanche, le nomos est le domaine réservé aux hommes. A l'inverse de la physis, il s'agit de créer un ordre artificiel et viable, bref une nature (cf. ce que Clément Rosset dit de Machiavel dans l'Anti-nature, mais aussi Castoriadis), un monde habitable car ordonné, régulier. En ce sens, il s'agit du domaine de la liberté humaine (soit sa créativité propre, l'imposition de sa propre nécessité à celle de la nature ; cf. la création de formes sociales déterminant le type d'un individu dans une société donnée). Cela passe notamment par l'ob-ligation, enchaînant des causes et des effets.