Euterpe a écrit: Or, justement, intimiste comme je suis, j'aurais tendance à considérer que le talent wagnérien pour "l'infiniment petit" a quelque chose du "viol", comme s'il voulait à toute force occuper tout "l'espace auditif" et, vraiment, avec lui, je n'ai jamais l'impression de pouvoir y aller par moi-même. Ce n'est pas faute d'avoir essayé, mais à chaque fois, ça devient une séance de torture, je crois entendre des génériques de films hollywoodiens.
J'apprécie comme vous les œuvres intimistes, j'aime beaucoup Ravel par exemple, mais j'ai également une grande admiration pour les symphonies, même celles de Bruckner avec orchestre complet. D'une manière plus générale, je pense que la dimension de l'orchestre n'implique pas une destruction de toutes les finesses de la musique, mis à part le bruit plus important (mais rappelons que l'orchestre wagnérien, à Bayreuth tout du moins, se trouve dans une fosse, et donc, le bruit en est sensiblement réduit, c'est d'ailleurs même pour cela que l'orchestration wagnérienne est plus puissante que d'autres). L'objection principale de Nietzsche contre Wagner est, pour le dire de manière plaisante, que sa musique ne fait pas danser. Et encore, la danse nietzschéenne nécessiterait des "pattes de colombe", pour dire sa légèreté ! Seulement, Nietzsche se place d'un point de vue classique. Or, la musique à son époque a changé, elle cherche à exprimer beaucoup plus de sentiments (ce que Nietzsche semble avoir détesté, après avoir beaucoup aimé Schumann dans sa jeunesse). C'est à peine si Mozart, dans son œuvre prolifique, s'est
vraiment exprimé une dizaine de fois. Parmi ses 41 symphonies, on ne retient que quelques passages où il semble crier au monde son inquiétude, sa détresse, sa résignation, rarement sa joie, car la joie mozartienne est superficielle.
Sauf que vous parlez d'une finesse d'écoute qui suppose de grands efforts. Vous auriez quelque chose à me faire entendre ? Y a-t-il moyen d'y aller latéralement, peut-être par une œuvre moins emblématique que celles auxquelles ont pense le plus souvent (notamment celles de sa Tétralogie), en choisissant par exemple parmi ses œuvres d'avant les années 60 (et en excluant Rienzi). Je sais, vous allez me dire que je veux écouter Wagner sans écouter Wagner !
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Non, malheureusement. Tannhäuser date de 1861. J'aime beaucoup cet opéra, mais il n'est pas représentatif du génie de Wagner. Voici comme un bon exemple de la finesse wagnérienne la longue nuit d'amour de Tristan und Isolde :
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