Ronin a écrit:L'angoisse s'auto-alimente en effet, et la tendance au pire, au pessimisme, voire au catastrophisme, est souvent très prononcée. D'où l'importance des stratégies "maniaques", tout ce qui implique une ritualisation, la répétition d'un geste, d'un acte ou d'une activité permettant d'aplanir le quotidien, de limiter les risques liés à l'irruption du nouveau. Les habitudes sont vitales pour les angoissés : ils vivent en terrain connu, prévisible, mécanique.Le stress est généré par la création en l'esprit de scénarios du pire. La pensée est suractivée par sa "volonté" (il s'agit en fait d'automatismes qui ont tendance à amplifier) d'imaginer ce qui risque de se produire. Un "terrain" rendu sensible par une "aventure", ou une suite d'expériences ressenties comme "négatives" sera enclin à produire davantage les schémas de pensée de nature à générer ce stress.
Mais le pessimisme est parfois si fort, et amplifie d'autant l'angoisse qu'on se retrouve avec des phénomènes intéressants comme la prémonition, le sentiment qu'un malheur va s'abattre sur un être proche. La prémonition est une activité mnésique "originale" : c'est la mémoire au futur, une stratégie de défense qui scénarise l'angoisse en la liant à un événement futur éventuel et d'autant plus redouté qu'il est craint, anticipé, donc déjà "présent". Face à cet inévitable malheur à venir, on se défend en le vivant d'avance, autrement dit en acceptant d'en subir les conséquences qui iraient avec s'il se produisait : le deuil, s'il s'agit d'un décès. De sorte que l'angoissé vit la perte intérieurement avant qu'elle ne se produise réellement. C'est typique d'une stratégie de défense. Et ça révèle comme l'instinct de survie d'un angoissé est d'autant plus prononcé qu'il est angoissé.
benfifi a écrit:Prévisible pour plusieurs raisons, dont la principale veut qu'à partir du moment où quelqu'un est tombé dans l'angoisse, il n'en sortira plus. Il y a des cycles, des crises, un processus à l'œuvre ; mais comme pour la cyclothymie, qui alterne dépression et excitation, l'angoisse alterne "panique" et "calme plat". Quand l'irruption du nouveau déchire le voile de l'habitude, quand un grain de sable vient gripper le mécanisme du quotidien qu'on a mis tant d'effort à élaborer, et qui reste fragile, on cède à la panique. Au fond, il faudrait comparer les événements, et voir s'ils ont des points en commun, quant à leur signification, etc. ; mais d'une manière générale, un événement est par définition du nouveau qui surgit, et comme il ne peut pas ne pas se faire qu'un événement se produise, l'angoisse est prévisible. Mais prévisible comme la mort : on sait qu'on va mourir ; quant à savoir à quel moment, c'est ce que nul ne saurait affirmer.Mais après coup, une fois la crise d'angoisse passée, il m'arrive de me dire que ça ne pouvait pas louper. En reprenant le fil de l'histoire, je finis par isoler l'évènement déclencheur, et le souvenir du risque ressenti : angoisse en vue. Un peu comme une réaction en deux temps : Le coup de vent, puis l'averse. Dans ce cas, si l'angoisse ne se commande pas, elle n'en est pas moins fortement prévisible.