Portail philosophiqueConnexion

Bibliothèque | Sitographie | Forum

Philpapers (comprehensive index and bibliography of philosophy)
Chercher un fichier : PDF Search Engine | Maxi PDF | FreeFullPDF
Offres d'emploi : PhilJobs (Jobs for Philosophers) | Jobs in Philosophy
Index des auteurs de la bibliothèque du Portail : A | B | C | D | E | F | G | H | I | J | K | L | M | N | O | P | Q | R | S | T | U | V | W | X | Y | Z

L'influence de l'Inde.

power_settings_newSe connecter pour répondre
+2
Liber
le morosophe
6 participants

descriptionL'influence de l'Inde. EmptyL'influence de l'Inde.

more_horiz
Bonjour à tous,

Vous connaissez sûrement, au moins de nom, un courant religieux de la Grèce antique appelé Orphisme. Le peu de chose que l'on sait à son sujet se résume à ce qui suit :

Tout d'abord, deux mythes fondateurs : la descente d'Orphée en enfer (justifiant sa connaissance de la mort, héritage des orphiques) et le démembrement de Dionysos. Ce dernier mythe fait naître l'humanité des cendres de titans qui se seraient attirés les foudres (littéralement) de Zeus en démembrant et dévorant son fils Dionysos. Les humains seraient donc composés d'une part dionysiaque, divine et pure, l'âme ; d'une part titanique, matérielle et impure, le corps. A la mort du corps, l'âme non-purifiée descendrait en enfer, s’abreuverait au fleuve Léthé (perdant ainsi tout souvenir de sa vie précédente) et se réincarnerait dans un nouveau corps. Les orphiques cherchaient à se purifier par l'ascèse, la poésie, le végétarisme et la non-violence. En choisissant de se tourner vers l'orphisme, le Grec quittait la société : non seulement il s'en écartait lui-même pour vivre reclus, mais l'interdiction de participer aux sacrifices sanglants lui rendait impossible toute participation à la vie religieuse - et donc sociale - des cités.

Ces idées peuvent nous sembler "banales" et déjà vues, mais en Méditerranée du VIe siècle avant notre ère, elles étaient totalement nouvelles. On peut assez facilement se représenter leur influence sur la philosophie classique : le système de Pythagore, inventeur du mot philosophie, en est plus qu'inspiré, et il est plus facile de compter les divergences entre Pythagorisme et Orphisme que les ressemblances : d'une part, alors que l'Orphisme recherche la purification par l'intuition et la spontanéité de la poésie, Pythagore préfère la réflexion logique et mathématique (influence intellectuelle grecque) et la réflexion symbolique (influence des cultes à mystères auxquels il était initié) ; d'autre part, alors que les orphiques cherchent à s'exclure de la société, les pythagoriciens s'y investissent et, se croyant "l'élite", estiment avoir le devoir de la dominer (possible influence encore une fois des cultes à mystères très hiérarchisés).

Toutes ses influences de l'Orphisme sur le Pythagorisme se retrouveront plus tard chez Platon, qui en fera son célèbre dualisme sensible/intelligible, qui "préparera" accidentellement le monde méditerranéen à la venue du christianisme... Bref, l'Orphisme a joué un rôle très important dans l'Histoire des idées, et même dans l'Histoire tout court (merci pour le moyen-âge, Orphée...).

Mais il est assez peu probable que les idées révolutionnaires de l'Orphisme soient nées d'elles-mêmes en Grèce (ou qu'un dénommé Orphée soit allé prendre l'apéro chez Hadès et Perséphone. Les premières traces de ce courant étant thraces, on lui suppose souvent une origine chamanique. La séparation de l'esprit et du corps ainsi que le mythe d'Orphée en tant qu'allégorie de la transe, et même, pourquoi pas, la réincarnation, pourraient effectivement être ainsi justifiés... mais il reste le rejet du corps et de la société, le refus de consommer de la viande et de tuer, etc. S'il ne tenait qu'à moi, je dirais que les orphiques sont des sâdhus occidentaux. L'orphisme est presque calqué sur les traditions ascétiques de l'Inde ! On retrouve telles quelles dans l'orphisme les notions de Samsara (cycle des réincarnations), de Karma ("loi de cause à effet" enfermant l'individu dans le Samsara), de Moksha ("éveil", arrêt du Samsara, but de la religion/philosophie) et d'Ahimsa (non-violence).

Le seul "problème" est qu'entre la Grèce antique et l'Inde, il y a la Perse, l'ennemi infranchissable... Il y a un certain temps que je cherche des indices permettant de supposer un contact intellectuel entre la Grèce et l'Inde. J'ai cru avoir "trouvé" plus que le nécessaire dans l'introduction aux Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres de Diogène Laërce : il y a un nom grec pour désigner les sages d'Inde ("gymnosophiste", sage-nu), et certains font provenir d'eux la philosophie. Mais je n'ai rien trouvé qui permette de croire que ce fameux mot, "gymnosophiste", soit antérieur à la période hellénistique... à mon grand dam.

Mais je viens de penser à quelque chose... en fait, "l'indice" permettant d'admettre un échange intellectuel gréco-indien pré-héllenistique existe bel et bien, et il est plus qu'évident ! Les éléments, tout bêtement...
On y est tellement habitué (fiction, histoire de la philosophie et de la physique, ésotérisme...) qu'on peut penser notre découpe des éléments en air - terre - eau - feu (et parfois éther, occupant une place particulière) est universelle, mais c'est loin d'être le cas. En extrême Orient par exemple, les éléments sont traditionnellement découpés en cinq : terre - fer - eau - bois - feu . Nos 4 (ou 4+1) éléments sont une construction culturelle, au même titre que les systèmes philosophiques... Or, il se trouve que ce découpage se retrouve en Ionie (avec l'école de Milet) et en Inde (avec le darshana Vaisheshika) bien avant Alexandre le Grand !

Je sais que ça ne "prouve" rien, mais ça rend acceptable (n'aimant pas les coïncidences, j'aurais même tendance à dire probable) des échanges culturels entre les mondes grec et indien bien plus anciens que ce que l'on soupçonne... et si c'est bien le cas, il serait difficile de voir autre chose en l'orphisme qu'un hindouisme ascétique "hellénisé". Le dualisme spirituel/matériel viendrait d'Inde, et le Christianisme devrait indirectement son installation en Europe à l'Hindouisme... amusant, non ?

descriptionL'influence de l'Inde. EmptyRe: L'influence de l'Inde.

more_horiz
Dans ce domaine, les influences sont plutôt à chercher du côté des Egyptiens.

descriptionL'influence de l'Inde. EmptyRe: L'influence de l'Inde.

more_horiz
Je ne connais pas grand chose de la pensée égyptienne... Le problème est que depuis Cagliostro et Napoléon on a une véritable "égyptomanie" et on s'amuse à faire dire n'importe quoi aux Égyptiens... On en fait autant des Indiens, bien sûr, mais eux ont une culture encore "vivante" et il est plus facile de vérifier les sources.

Je sais que les Égyptiens, au moins par leurs mathématiques, ont influencé Thalès, et donc les débuts de notre philosophie. Mais il ne me semble pas qu'ils aient admis des notions telles que les quatre éléments ou la réincarnation. Quand au dualisme corps/esprit, il était loin d'être clair chez eux... il y avait plutôt une séparation post-mortem du corps "djet" avec les deux essences plus subtiles de l'individu que sont le "ba" et le "ka", toutes deux aussi différentes l'une de l'autre que du corps.
J'ai tendance à considérer que la philosophie grecque est née grâce à un "brassage d'informations". L'ouverture d'esprit inhérente à l'étendue géographique de la civilisation grecque (de Massalia à l'Ionie) cumulée à la possibilité d'accéder à des systèmes logiques et mathématiques développés parallèlement par les Égyptiens et les Babyloniens a amené certains génies du monde méditerranéen (grec, donc) à imaginer un système logique "absolu" et cosmique intelligible. La première philosophie grecque n'aurait été qu'une physique... ce n'est qu'après que serait intervenue (indirectement, via l'Orphisme) l'Inde, amenant Pythagore à associer la philosophie méditerranéenne basée sur la compréhension de la nature à la philosophie indienne basée sur l’ascension spirituelle de l'individu (à laquelle il aurait aussi ajouté -petite contribution personnelle de sectaire mégalo - une dimension sociale et politique).
Et vous connaissez la suite... bref, la philosophie (distincte de la science) serait apparue en Occident grâce à un contact indirect avec l'Inde.

descriptionL'influence de l'Inde. EmptyRe: L'influence de l'Inde.

more_horiz
Disons qu'à l'époque historique, tous les philosophes se tournent vers l'Egypte, certains y font même un voyage et sont initiés par les prêtres. En revanche, je ne vois rien de tel vis-à-vis des Indiens. Vous accordez également trop d'importance à l'orphisme dans la pensée philosophique grecque.

descriptionL'influence de l'Inde. EmptyRe: L'influence de l'Inde.

more_horiz
D'abord je ne vois rien de si surprenant à ce qu'il y ait des points communs ou fils conducteurs entre les anciennes croyances connues de l'Inde (où se situent les plus anciennes civilisations) et celles apparues plus tard en Europe avec la mythologie.
En tout cas j'ai trouvé ces quelques éléments qui pourraient vous aider à avancer dans vos recherches :

encyclopédie encarta a écrit:
Vedanta (du sanskrit veda, « connaissance » ; anta, « fin »), l'une des six philosophies orthodoxes de l'hindouisme, dont l'intérêt porte principalement sur la connaissance du brahman, l'Être pur et suprême universel. Le vedanta est fondé sur la partie spéculative de l'ancienne littérature védique, en particulier les traités connus sous le nom de Aranyakas et Upanishad...
Transmigration des âmes... Dans la pensée et la philosophie religieuses orientales, la croyance en la transmigration ne semble pas avoir fait partie des plus anciennes croyances des conquérants aryens de l'Inde. Elle apparaît pour la première fois sous forme de doctrine dans l'ensemble religieux et philosophique que représentent les Upanishads (VIe siècle av. J.-C. environ). Cependant, depuis, le samsâra, l'incessant tourbillon des naissances et des morts dont l'homme ne parvient pas à se libérer, a toujours été l'un des plus importants principes des trois principales religions orientales : l'hindouisme, le bouddhisme et le jaïnisme.
Encyclopédie Universalis a écrit:
La mort (réflexions philosophiques sur)
… Historique du problème
La grande diversité de positions fournies sur le problème de la mort par l'histoire de la philosophie peut se ramener à trois lignes fondamentales : les doctrines de la chute, les doctrines de l'information, les doctrines de la dispersion. Curieusement, aucune de ces dénominations ne se réfère ouvertement au terme de la vie humaine, puisqu'elles portent plutôt sur la constitution de la nature de l'homme…
- Les doctrines de la chute :
Si le courant des doctrines de la chute est dominé par la figure de Platon, son élaboration philosophique s'inaugure cependant avec les Upanishads et se prolonge, par-delà Origène, jusqu'à Descartes et Malebranche. L'axe qui joint des philosophies aussi différentes est le dualisme de l'âme et du corps. La vie humaine naît de leur rencontre et la mort est leur séparation. Mais, pour la pensée grecque devenue chrétienne, cette rencontre est l'effet d'une création de l'âme, alors qu'elle est la conséquence d'une chute pour les philosophies antérieures. Chute ou création détermineront des différences importantes dans les conceptions de la vie et de la mort.
Des Upanishads à Plotin, en passant par l'orphisme, Pythagore, Empédocle, Platon et la gnose, seul l'Un existe absolument, alors que la multiplicité est une zone d'irréalité. Le passage au multiple se conçoit alors comme une dégradation et une chute dans la matière. Les âmes, issues de l'Un en qui elles sont unies, inengendrées, et par là immortelles comme lui-même, descendent dans les corps périssables par choix libre ou par inclination nécessaire afin d'y commencer une existence qui sera une épreuve purificatrice. Jusqu'à mériter le retour à l'univers divin de l'Un, les âmes connaîtront une ou plusieurs transmigrations. Une ascèse de vie ou une discipline de l'intelligence peuvent raccourcir cette durée d'un exil plein des séductions fallacieuses du monde sensible, qui ne réussissent cependant pas à assoupir en elles la nostalgie de leur noblesse originelle. La mort se présente alors comme une libération de la prison corporelle. « L'objet propre de l'exercice des philosophes est même de détacher l'âme et de la mettre à part le corps » (Platon, Le Phédon, 67 c-d). Et pour Plotin, comme pour Platon, le mouvement de « conversion » doit correspondre à celui de la « procession » (Ennéades, IV) et redonner à l'âme le goût de l'intelligible et du réel, dans lesquels elle finira par se résorber comme les fleuves se perdent dans la mer…
privacy_tip Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
power_settings_newSe connecter pour répondre