Il n'y a pas longtemps, on a eu un chouette débat sur le mariage gay, avec des types des deux côtés parfaitement incapables de répondre aux arguments de l'autre. Ça a duré un certain temps...
Chacun avait sans doute une part de vérité, mais je n'ai vu pour ma part aucun dialogue fructueux : deux clans parfaitement incapables de se parler.
Et puis le problème s'est posé de l'adoption des enfants avec des parents gay. Et qui a-t-on vu en guise d'experts ? Des psychanalystes et rien que des psychanalystes. Beaucoup étaient réservés à l'idée qu'un môme ait deux parents du même sexe, sans doute que leur récit se conjuguait mal avec ce type de système. Qui leur a répondu ? Et bien personne... je veux dire aucune expertise autre, qui soit posée en contre-pouvoir à la légitimité qu'elle prétend. Bref, l'expertise en matière d'enfants, en France, c'est la psychanalyse et point-barre ! On l'a élevé au rang d'institution, et d'ailleurs tout ce qui tourne autour de la psychologie s'est plus ou moins rallié aux stades de développement de l'enfant qu'elle a comptabilisés et établis en norme.
Et c'est ça qui gêne.
Ce n'est pas les traitements eux-mêmes, qui dès fois marchent et d'autres pas. Ce n'est pas même tant que son laïus sur l'inconscient (l'inconscient est structuré blabla) qui semble passer comme une lettre à la poste dans les esprits, c'est que c'est comme ça et pas autrement : on sait, tout est sous contrôle...
La psychanalyse s'est instaurée (en France bien plus qu'ailleurs d'ailleurs) comme une forme de savoir, et donc exerce un pouvoir normatif dans l'opinion. Elle récite les stades de la formation psychique de l'enfant comme si ça allait de soi, et personne ne semble rien avoir à y redire : à tel âge, il arriverait ceci à bébé, plus tard, il se passera cela etc. et si quelque chose n'a pas l'air de fonctionner comme c'est écrit, c'est tout juste si les pauvres parents ne sont pas terrorisés en imaginant que leur môme est anormal, qu'il va lui arriver tout un tas de trucs : affreux, forcément. Alors ils se précipitent chez l'expert comme on allait voir le docteur il y a cent ans, en tortillant leurs doigts dans la salle d'attente.
Bref, elle s'est accaparée ce que doit être un enfant.
On ne voit plus très bien ce qu'il restera un jour comme place pour l'inconnu, pour la vie dans ce qu'elle peut aussi avoir de surprenant et de magique, si même le regard sur l'enfance doit être répertorié selon des critères stricts de normalité par un savoir, qui veut s'emparer de tout sans laisser une miette à quoi que ce soit qui ressemble à de la créativité, à un peu de liberté.