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[résolu]L'usage kantien de la locution "a priori".

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4 participants

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Bonjour,

Pré requis au problème :
Le sens « a priori » chez Kant signifie une connaissance sans intervention d'expérience. Une connaissance pour laquelle la proposition inclut sa nécessité.

En reprenant l'exemple de Wikipedia sur « a priori » :
Exemple « a posteriori » déterminé par l'expérience : Georges V a régné de 1705 à 1790.
Exemple « a priori » non déterminé par l'expérience : Georges V, s'il a régné, a au moins régné un jour.

Problème : Pour l'exemple a priori, il faut connaître le sens de régner et connaître via l'expérience ce que cela signifie (ou par décomposition en définitions simples issues obligatoirement de l'expérience). Donc il y a détermination par expérience. Je ne comprends pas du coup « a priori », à moins que l'on dise que « a priori » parte d'une réflexion logique prenant comme fondement une expérience.

Autre difficulté de la définition de « a priori », la notion de « nécessité » :

Décomposons la proposition : Georges V, s'il a régné, a au moins régné un jour. Cela veut dire que la nécessité de « régner » est « régner un jour ». Je ne sais pas si clairement la définition de régner doit avoir un minimum d'un jour mais dans ce cas là régner selon « la nécessité » fait définition pour « règne », et la notion de « a priori », une proposition qui inclut la nécessité, serait aussi une proposition dont la nécessité serait une partie de la définition de règne. Je trouve donc que la notion d'a priori ne serait que l'énonciation du sens de régner soit pure évidence. Une proposition a priori serait une pure évidence.

Merci d'avance.

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Il faut comprendre la chose sous la perspective du transcendantal, c'est-à-dire de la condition de possibilité. A priori signifie ce qui est donné avant toute expérience. Bien entendu, l'homme est un être d'expérience. Mais il peut comprendre quelles sont les conditions (de possibilité) qui rendent possible son existence et qui sont nécessaires à celle-ci, de même en ce qui concerne la connaissance et l'expérience elle-même. Par exemple, l'espace est une condition de l'accès à soi, au monde et de la connaissance. Cette condition est universelle et nécessaire, c'est un cadre par lequel l'homme est ce qu'il est et peut se saisir d'objets, du monde, par la sensibilité et l'entendement. Voilà ce que j'en comprends.

Dans votre exemple, je ne saurais appliquer cette notion. Ce que je peux dire, toutefois, c'est que régner implique plusieurs choses : un sujet règne nécessairement sur quelque chose (un domaine, un autre sujet) à laquelle il se trouve lié et cela pendant un minimum de temps et dans un espace, bref dans une circonstance qui implique espace et temps. On dit souvent que tel monarque a régné pendant tant de jours. L'unité du règne serait alors le jour. Régner serait donc au minimum régner un jour. Mais on ne sait pas, en disant cela, de quelle manière le règne s'est effectué et seule l'expérience peut dire quelque chose sur la singularité du cas.

Dernière édition par Silentio le Jeu 16 Aoû 2012 - 11:17, édité 1 fois

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Il y a une erreur. Voici le texte complet de l'article de Wikipedia que vous mentionnez, qui concerne la distinction intuitive entre l'a priori et l'a posteriori, pas la distinction kantienne :
Bien que les définitions et l'utilisation des termes aient varié dans l'histoire de la philosophie, ils ont constamment marqué deux notions épistémologiques distinctes. La distinction intuitive des connaissances a priori et a posteriori est plus facilement observable dans les exemples. En empruntant à Jerry Fodor (2004), prenons par exemple la proposition exprimée par la phrase "George V souverain de 1910 à 1936." C'est une connaissance (si elle est vraie) qu'il faut tenir pour savoir a posteriori, car elle exprime un fait empirique inconnaissable par la raison seule. Par contre, considérons la proposition : "Si George V régna sur tous, alors il aura régné au moins une journée." C'est une connaissance a priori, parce qu'elle dérive d'une déclaration que l'on peut déduire par la seule raison.


Chez Kant, la distinction n'est pas intuitive, mais critique (cf. critère). Il vous faut donc choisir un autre exemple. Voici le § 2 de l'introduction à sa Critique de la raison pure :
Il importe ici d'avoir un signe qui nous permette de distinguer sûrement une connaissance pure d'une connaissance empirique. L'expérience nous enseigne bien qu'une chose est ceci ou cela, mais non pas qu'elle ne puisse être autrement. Si donc, en premier lieu, il se trouve une proposition qu'on ne puisse concevoir que comme nécessaire, c'est un jugement a priori ; si, de plus, elle ne dérive elle-même d'aucune autre proposition qui ait à son tour la valeur d'un jugement nécessaire, elle est absolument a priori. En second lieu, l'expérience ne donne jamais à ses jugements une universalité véritable ou rigoureuse, mais seulement supposée et comparative (fondée sur l'induction), si bien que tout revient à dire que nous n'avons point trouvé jusqu'ici dans nos observations d'exception à telle ou telle règle. Si donc on conçoit un jugement comme rigoureusement universel, c'est-à-dire comme repoussant toute exception, c'est que ce jugement n'est point dérivé de l'expérience, mais que sa valeur est absolument a priori. L'universalité empirique n’est donc qu’une extension arbitraire de valeur ; d’une proposition qui s’applique à la plupart des cas on passe à une autre qui vaut pour tous les cas, comme celle-ci, par exemple : tous les corps sont pesants. Lorsque, au contraire, une rigoureuse universalité est le caractère essentiel d’un jugement, c’est qu’il suppose une source particulière de connaissances, c’est-à-dire une faculté de connaître a priori. La nécessité et l’universalité absolue sont donc les marques certaines de toute connaissance a priori, et elles sont elles-mêmes inséparables. Mais, comme dans l’usage, il est parfois plus facile de montrer la limitation empirique des jugements que leur contingence, ou l’universalité absolue que la nécessité, il est bon de se servir séparément de ces deux critérium, dont chacun est à lui seul infaillible.

Maintenant, qu’il y ait dans la connaissance humaine des jugements nécessaires et absolument universels, c’est-à-dire des jugements purs a priori, c’est ce qu’il est facile de montrer. Veut-on prendre un exemple dans les sciences : on n’a qu’à jeter les yeux sur toutes les propositions des mathématiques. Veut-on le tirer de l’usage le plus ordinaire de l’entendement : on le trouvera dans cette proposition, que tout changement doit avoir une cause. Dans ce dernier exemple, le concept d’une cause contient même si évidemment celui de la nécessité d’une liaison entre la cause et l’effet et celui de l’absolue universalité de la règle, qu’il serait tout à fait perdu si, comme l’a tenté Hume, on pouvait le dériver de la fréquente association du fait actuel avec le fait précédent et de l’habitude où nous sommes (et qui n’est qu’une nécessité subjective) d’en lier entre elles les représentations. Il n’est pas nécessaire d’ailleurs de recourir à ces exemples pour démontrer la réalité de principes purs a priori dans notre connaissance ; on pourrait aussi la prouver a priori, en montrant que, sans eux, l’expérience même serait impossible. En effet, où cette expérience puiserait-elle la certitude, si toutes les règles d’après lesquelles elle se dirige étaient toujours empiriques, et, par conséquent, contingentes ? Aussi ne saurait-on donner des règles de ce genre pour des premiers principes. Mais nous nous contenterons ici d’avoir établi comme une chose de fait l’usage pur de notre faculté de connaître, ainsi que le critérium qui sert à le distinguer. Ce n’est pas seulement dans certains jugements, mais aussi dans quelques concepts que se révèle une origine a priori. Écartez successivement de votre concept expérimental d’un corps tout ce qu’il contient d’empirique : la couleur, la dureté ou la mollesse, la pesanteur, l’impénétrabilité, il reste toujours l’espace qu’occupait ce corps (maintenant tout à fait évanoui), et que vous ne pouvez pas supprimer par la pensée. De même, si, de votre concept empirique d’un objet quelconque, corporel ou non, vous retranchez toutes les propriétés que l’expérience vous enseigne, vous ne pouvez cependant lui enlever celles qui vous le font concevoir comme une substance ou comme inhérent à une substance (quoique ce concept soit plus déterminé que celui d’un objet en général). Contraints par la nécessité avec laquelle ce concept s’impose à vous, il vous faut donc avouer qu’il a son siège a priori dans votre faculté de connaître

Autrement dit, ôtez l'expérience, il ne reste pas rien, mais une faculté de connaître a priori (cf. espace et temps), qui implique des jugements purs a priori (cf. L'analytique des concepts, 1er chapitre).

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Merci pour vos réponses,

Prenons un autre exemple tiré de la Critique de la raison pure :
Tout changement doit avoir une cause.

Celui-ci est un jugement a priori de par la nécessité que pour tout changement il y a au moins une cause et de par l'universalité de la règle. Là je comprends la nécessité de par l'évidence que, pour un changement, il y a une cause, mais il n'y a pas "annihilation de l'expérience", nous avons besoin de vivre ce changement pour concevoir qu'il y a une cause. La conception de cause se fait par l'expérience et pas en enlevant l'expérience.

La notion d'a priori comme je l'emploie tous les jours est pour indiquer un jugement non sûr que l'on admet mais qui n'est pas vérifié.
Est-ce que la notion de a priori de KANT est une pensée non sûre et non vérifiée ?

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anoho a écrit:
Merci pour vos réponses,

Prenons un autre exemple tiré de la Critique de la raison pure :
Tout changement doit avoir une cause.
Celui-ci est un jugement a priori de par la nécessité que pour tout changement il y a au moins une cause et de par l'universalité de la règle. Là je comprends la nécessité de par l'évidence que, pour un changement, il y a une cause, mais il n'y a pas "annihilation de l'expérience", nous avons besoin de vivre ce changement pour concevoir qu'il y a une cause. La conception de cause se fait par l'expérience et pas en enlevant l'expérience.
Puisque vous vous êtes référé à l'article Wikipedia, il vous suffit de reprendre le passage qui vous donne l'explication. Kant distingue les jugements a priori (dérivés de certaines expériences de base), et les jugements purs a priori (sans recours à l'expérience) :
Wikipedia a écrit:
Kant distingue les connaissances a priori (elles portent sur des éléments dont l'un n'est connu que par l'expérience) et les "connaissances pures a priori" (elles ne contiennent aucun élément empirique, venu de l'expérience)
Cette remarque renvoie exactement à ce passage de Kant (toujours dans l'introduction, § 1) :
Mais, si toutes nos connaissances commencent avec l'expérience, il n'en résulte pas qu'elles dérivent toutes de l'expérience. En effet, il se pourrait bien que notre connaissance expérimentale elle-même fût un assemblage composé de ce que nous recevons par des impressions, et de ce que notre propre faculté de connaître tirerait d'elle-même (à l'occasion de ces impressions sensibles), quoique nous ne fussions capables de distinguer cette addition d'avec la matière première que quand un long exercice nous aurait appris à y appliquer notre attention et à les séparer l'une de l'autre. C'est donc, pour le moins, une question qui exige un examen plus approfondi et qu'on ne peut expédier du premier coup, que celle de savoir s'il y a une connaissance indépendante de l'expérience et même de toutes les impressions des sens. Cette espèce de connaissance est dite a priori, et on la distingue de la connaissance empirique, dont les sources sont a posteriori, c'est-à-dire dans l'expérience.

Mais cette expression n'est pas encore assez précise pour faire comprendre tout le sens de la question précédente. En effet, il y a maintes connaissances, dérivées de sources expérimentales, dont on a coutume de dire que nous sommes capables de les acquérir ou que nous les possédons a priori, parce que nous ne les tirons pas immédiatement de l'expérience, mais d'une règle générale que nous avons elle-même dérivée de l'expérience. Ainsi, de quelqu'un qui aurait miné les fondements de sa maison, on dirait qu'il devait savoir a priori qu'elle s'écroulerait, c'est-à-dire qu'il n'avait pas besoin d'attendre l'expérience de sa chute réelle. Et pourtant il ne pouvait pas non plus le savoir tout à fait a priori ; car il n'y a que l'expérience qui ait pu lui apprendre que les corps sont pesants, et qu'ils tombent lorsqu'on leur enlève leurs soutiens.

Sous le nom de connaissances a priori, nous n'entendrons donc pas celles qui sont indépendantes de telle ou telle expérience, mais celles qui ne dépendent absolument d'aucune expérience. À ces connaissances sont opposées les connaissances empiriques, ou celles qui ne sont possibles qu'a posteriori, c'est-à-dire par le moyen de l'expérience. Parmi les connaissances a priori, celles-là s'appellent pures, qui ne contiennent aucun mélange empirique. Ainsi, par exemple, cette proposition : tout changement a une cause, est une proposition a priori, mais non pas pure, parce que l'idée du changement ne peut venir que de l'expérience.


anoho a écrit:
La notion d'a priori comme je l'emploie tous les jours est pour indiquer un jugement non sûr que l'on admet mais qui n'est pas vérifié.
Est-ce que la notion de a priori de KANT est une pensée non sûre et non vérifiée ?
Non, l'usage kantien de cette locution lui est propre.

Dernière édition par Euterpe le Mer 10 Aoû 2016 - 12:54, édité 1 fois
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