cyr a écrit: La philosophie donne de grands vertiges, car elle pose des questions qui ébranlent la réalité. Non ?
Pas uniquement. Mais du reste, qu'entendez-vous par "ébranle la réalité ?". J'admets qu'un exemple serait ici le bienvenu.
Cyr a écrit: Je crois que l'on n'est pas de plein pied dans la philosophie, seulement parce que l'on se pose des questions philosophiques, mais aussi parce que l'on essaie d'y répondre et de manière philosophique.
L'acte le plus philosophique est certainement celui de
poser la question. Si vous arrivez à poser la question d'un problème, vous philosophez, et pas qu'un peu, il suffit de lire un dialogue socratique pour s'en rendre compte : Socrate exige toujours que le sujet du débat soit posé, et la réponse n'a aucune importance ou presque.
Quant à répondre au problème, il ne mène bien souvent qu'en dehors de la philosophie, nous devons l'admettre, précisément car répondre au problème, c'est le fermer. Or, le défi philosophique est peut-être celui de ne pas se laisser aller à répondre, à conclure, comme dirait Flaubert.
cyr a écrit: Desassossego a écrit: Je me demande comment la philosophie peut satisfaire une telle lecture... Si vous lisez pour entrer dans une rêverie, pourquoi ne vous tournez-vous pas vers la poésie ou certains romans, beaucoup plus propices à ce genre de démarche ?
Vous avez sans doute une manière assez studieuse de lire. Si j'essayais de faire d
e même, je ferais sans doute beaucoup d'efforts, pour n'arriver à rien de probant.
Il me faut un à plusieurs mois pour lire un livre, voire même dans certains cas, plus d'une année... Le résultat en est que chaque livre me paraît s'apparenter davantage à un songe étendu qu'à une vérité. Pour moi, la première vocation de ces livres, est d'être les porteurs d'hypothèses à vivre, et je ne pense pas que cela puisse se faire dans le tumulte « d'un instant ». Si les mécanismes utilisés pour la démonstration sont clairs, la démonstration l'est bien moins, parce que les objets sont compliqués, plus compliqués qu'en mathématique. Je crois qu'il faut les rêver, laisser l'imagination prendre son essor.
Je ne sais pas tellement quoi faire et comment, sur ce point. C'est pour ça que je viens, aussi.
J'admets ne pas bien voir le rapport entre ma réflexion et l'idée d'une lecture studieuse. Si votre rythme de lecture vous donne l'impression que chaque livre est une rêverie, ne pensez-vous pas que c'est problématique pour la lecture elle-même ? Comment vous serait-il possible de comprendre ce que dit un philosophe si vous supposez que ce qu'il vous dit est à entendre comme quand on entend un conte merveilleux ? Je ne dis pas qu'il n'y a pas de rêverie sérieuse (la poésie en est la preuve), mais c'est tout simplement qu'il me paraît impossible d'avancer en philosophie si on lit les œuvres philosophiques comme de longues rêveries...
Que voulez-vous dire par "hypothèse à vivre" ?
De même, je ne pense pas que ce soit en rêvant les textes philosophiques, comme vous dites, que l'on peut parvenir à les comprendre ou même à saisir ce vers quoi ils veulent nous porter.