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Les mythes comme récits fondateurs.

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4 participants

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Comme certains le savent j'ai commencé un travail de recherche sur les relations tumultueuses entre passion et raison... Mes recherches m'ont conduit à différentes lectures : Pinker, Platon, les poètes romantiques (Carpe Diem), Kant, Judith Harris et plus récemment les Fables de La fontaine et celleS d’Ésope, les contes de Grimm et de Perrault...
Vous me direz, mais quels points communs entre les fables et les contes pour enfants ? mais aussi avec le thème de la passion et notamment la passion amoureuse ?

Déjà ce sont ce que je nommerais des mythes "fondateurs" d'une culture, d'une civilisation : on raconte aux enfants dès les premiers âges des contes décrivant une vie idéale où malgré les embuches, le bon prince finit toujours par tirer la belle princesse de la triste réalité... Ces histoires finissent toujours par ce genre de phrase : "ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants..." Mais la réalité est loin d'être si rose, surtout quand on sait qu'un mariage sur trois finit par un divorce... Mais alors pourquoi autant de divorces, pourquoi les gens se trompent-ils à ce point ? Confondent-ils amour-passion et amour raisonnable ? Bien loin de moi, de penser que ces contes sont inutiles et sans intérêt, mais il faudrait les réserver à un public averti, il faut avoir une certaine maturité d'esprit pour comprendre qu'ils ne correspondent pas à la réalité... Je me suis mis à interroger les gens autour de moi sur l'amour : les femmes me répondent souvent qu'elles souhaitent vivre un amour passion avec un beau prince avec lequel elles entreront en fusion... mais cette idéalisation de l'amour n'est-elle pas le fruit d'un mythe culturel lié aux histoires que l'on raconte à nos enfants ?

Si je prends les Fables de La Fontaine, je m'aperçois qu'elles ne finissent pas toujours bien, parfois une bonne fin, parfois une fin malencontreuse... Elles correspondent à la vrai vie, à ce que les enfants plus tard devront affronter : si je prends les plus célèbres :
- le corbeau et le renard : qu'enseigne cette fable, si ce n'est qu'il faut se méfier des apparences, des beaux parleurs et autres sophistes, car l'on ne sait jamais de quelles intentions ils sont animés à notre égard ?
- la cigale et la fourmi nous enseigne qu'il vaut mieux prévoir que courir...
- la grenouille qui voulait devenir bœuf nous apprend qu'il ne sert à rien de vouloir ressembler à quelqu'un d'autre que soi-même....

Les exemples sont nombreux, et oui, vous pourriez me dire : mais un enfant ne comprend pas tous ces messages cachés, ces morales... C'est que vous mésestimez l'intelligence des enfants : les fables sont des mythes "fondateurs" qui s'ancrent dans un inconscient collectif... Ces histoires racontées dans l'enfance, permettent à l'enfant d'expérimenter leurs leçons dans leurs interactions avec l'environnement... L'enfant qui aura "cramé" tout son argent de poche dans un jouet, et qui regrette après car il se rend compte qu'il aurait pu économiser pour s'acheter un plus grand jouet, pourra se dire qu'il a été "cigale" et qu'il aurait peut-être mieux fait de faire comme son frère ou sa sœur qui lui est plus "fourmi"...

Il faut faire attention au type de mythe auquel on veut faire appel dans l'éducation de nos enfants, car si on leur fait croire qu'il existe de beaux princes et de belles princesses sans défaut, ils auront tendance, à l'âge adulte, à faire le choix de l'amour passion (qui par définition même est voué à être éphémère : voire pour ce thème le Carpe Diem ou le dialogue de Socrate avec Alcibiade)... Je vois trop de jeunes femmes belles et intelligentes qui rêvent d'une passion dévorante et d'être enlevées à leur triste sort (qui est souvent pas si mal que cela pourtant) par le prince charmant, et quand cela semble arriver, après quelque temps, la belle princesse prend de l'âge et sa beauté se fane et le beau prince a de plus en plus tendance à se transformer en "pantouflard" accroché à ses habitudes... Alors les gens divorcent, c'est peut-être pas tant de leur faute que des belles histoires qu'on leur a racontées et auxquelles ils ont cru...

On pourrait me dire en dernier lieu, qu'un amour passionnel peut se transformer en amour raisonnable, qu'une fusion d'âmes (passion) peut se transformer en âmes complices volant vers les mêmes horizons (amour raisonnable) ? Oui, je pense que cela est possible, mais cela ne se fait pas sans difficulté et doit être quand même très rare... Mais il reste un espoir, un tout petit, celui de transformer les mythes fondateurs dominants (les belles histoires avec de belles fins) en conte réaliste, proche des réalités futurs à vivre... A quoi bon mentir à nos enfants ? L'amour existe, mais il est une construction à deux, et c'est seulement à cette condition qu'il peut à mon avis durer toute une vie...

Quelques réflexions que j'avais envie de partager...

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N'y a-t-il pas une différence notoire entre le conte et le mythe ?

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Le mythe est lié à l'imaginaire d'un peuple et à son fonds de représentations (plus ou moins conscientes) du monde ; souvent l'origine du mythe est indéterminée ou fait elle-même partie du mythe.
Le conte reste un écrit la plupart du temps situé dans l'histoire et produit par un auteur (connu ou non) ; c'est une représentation consciemment imaginaire, même si elle peut aussi nourrir l'inconscient d'un peuple lorsque le conte est très ancré dans sa culture.
On peut supposer que certains contes sont devenus des mythes mais ça reste diffus ; par exemple la Théogonie de Hésiode a des attributs d'un conte mais s'inscrit dans la mythologie grecque, qu'elle a largement nourrie. Pour autant ce n'est pas son unique origine.

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Vangelis a écrit:
N'y a-t-il pas une différence notoire entre le conte et le mythe ?

Votre question est très pertinente et je vais essayer d'y répondre avec l'état actuel de mes connaissances :

d'abord une remarque, il est vrai que j'écris souvent en utilisant un peu plus ma raison, mais il m'arrive parfois d'être submergé par mes sentiments, ce texte a été écrit plus avec ces derniers... De ce fait, je n'ai pas trop réfléchi à la précision de certains termes et de leurs concepts, erreur grave, qui aurait pu être évitée si j'avais été moins impulsif...

Néanmoins, j'y ai réfléchi depuis, et j'ai eu l'occasion de discuter avec quelques personnes du sujet (mes recherches prennent différentes formes, lectures, écoute d'émissions, discussions, et enquêtes d'opinion...), je parle d'inconscient collectif, on m'a rappelé que cette notion vient de Jung, mais il en a défini une autre : les archétypes fondateurs (il faut que je vérifie l'information en lisant Jung)... D'après ce que j'ai compris de sa pensée : Jung s'est démarqué de Freud en posant l'hypothèse de l’existence d'un inconscient collectif (Freud a rejeté cette idée et s'est fâché après son ami de longue date...), dans Jung, il y a un peu une connotation mystique, mais on pourrait rapprocher cette notion (inconscient collectif) d'une culture commune fondatrice d'une civilisation, pourrait-on en convenir ? Si tel est le postulat, alors on pourrait se demander qu'est-ce qui fonde un inconscient collectif ou une culture commune ? Ne pourrait-on pas trouver une partie de la réponse dans ce que Jung nomme les "archétypes fondateurs" ? Quels sont-ils ? Tout simplement les contes, les mythes, les romans... Si je prends les contes de Grimm, la mythologie grecque (les 12 travaux d'Hercule, par exemple), les Fables de la Fontaine, bien qu'il soient différents, dans les idées, le style, la forme, le fond presque en tout, ne sont ils pas connus de tous ? Ne participent-ils pas à l'élaboration d'une culture commune ? Ils auraient alors une fonction éminemment importante, car s'ils donnent des enseignements, ils ancrent aussi des systèmes de pensée automatiques comme les stéréotypes. Ces derniers sont souvent extrêmement résistants et très difficiles à identifier par soi-même, ils sont même à l'origine de beaucoup de nos croyances... Alors s'il est si difficile de lutter contre ces derniers, ne pourrait-on pas les assouplir avant même leur développement en proposant des archétypes fondateurs qui donnent du sens à la vie future adulte ?

Pour exemples de stéréotypes dus à un archétype fondateur dont font partie les contes : ceux par exemple qui renvoient une certaine image de la femme : belles princesses, avec de belles robes qui mettent des beaux bijoux, et une autre de l'homme : un beau prince, bien viril, qui affronte tous les dangers avec courage et sans peur...

Je crois que ce texte est une proposition d'amélioration de notre façon de fonctionner collectivement en changeant un peu ce qui nous fonde... J'ai bien conscience que c'est une ambition qui pourrait paraître prétentieuse, mais est-ce qu'essayer de comprendre, ce n'est pas aussi un peu essayer d'améliorer les choses ?

Alors oui, les contes et les mythes sont très différents, j'en conviens aisément, mais ils ont tous les deux un rôle à jouer dans ce qui fonde notre "inconscient collectif". Suite à votre remarque constructive, je vais réfléchir à une modification de mon texte* (ça prendra un peu de temps car je ne veux pas le faire sans lire un peu plus Jung, et j'ai déjà 10 bouquins en attente, parfois je me dis que ce serait pas mal un port usb dans le cou pour charger toutes les données dans le cerveau, ça gagnerait du temps, mais cela risquerait de se faire au prix d'une moins bonne capacité d'appropriation...) encore merci Vangelis pour votre remarque, j'espère que j'ai répondu à la question ?


* Ce n'est pas une bonne pratique car sinon les réponses qui suivent ne veulent plus rien dire. Apportez une rectification dans un nouveau message si vous le souhaitez – Vangelis.

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nnikkolass a écrit:
Je vois trop de jeunes femmes belles et intelligentes qui rêvent d'une passion dévorante et d'être enlevées à leur triste sort (qui est souvent pas si mal que cela pourtant) par le prince charmant, et quand cela semble arriver, après quelque temps, la belle princesse prend de l'âge et sa beauté se fane et le beau prince a de plus en plus tendance à se transformer en "pantouflard" accroché à ses habitudes...

Si j'ai bien compris vous effectuez « un travail de recherche sur les relations tumultueuses entre passion et raison », c'est votre premier sujet. J'espère que je ne m'égarerai pas trop. Je lisais dans une fiche de cours de littérature : « Les romantiques privilégient la poésie, plus apte à décrire les passions et les mouvements de l’âme, et font triompher le roman... ». Je crois que dans votre démarche, il pourrait être important de comprendre ce que c'est que le romantisme (passionné), ce qu'il apporte, sur quoi repose-t-il, et ce que j’appellerais aussi les « faux-semblants » du romantisme. Par « faux-semblants » du romantisme, je veux dire ces images romantiques, culturellement acceptées, socialement valorisantes mais dénuées de cette poésie toute éprouvée, propre à renverser le réel.

nnikkolass a écrit:
Bien loin de moi, de penser que ces contes sont inutiles et sans intérêt, mais il faudrait les réserver à un public averti, il faut avoir une certaine maturité d'esprit pour comprendre qu'ils ne correspondent pas à la réalité...

Les contes réservés aux adultes ? Un enfant, c'est je crois, une personne qui vit dans un monde au fantastique plus facile que le nôtre. Les enfants pourraient dire de même, s'ils pouvaient savoir ce que c'est qu'un adulte ; qu'il faut réserver leurs contes à un public averti, un public capable d'imaginer aussi bien qu'eux le dragon, la fée, l'univers. Ils pourraient bien nous dire, que notre imagination est trop flétrie pour entendre ce que l'histoire a d'important à nous raconter.

nnikkolass a écrit:
Je me suis mis à interroger les gens autour de moi sur l'amour : Les femmes me répondent souvent qu'elles souhaitent vivre un amour passion avec un beau prince avec lequel elles rentreront en fusion... mais cette idéalisation de l'amour n'est-elle pas le fruit d'un mythe culturel lié aux histoires que l'on raconte à nos enfants ?

Il faut faire attention à quel type de mythe on veut faire appel dans l'éducation de nos enfants, car si on leur fait croire qu'il existe de beau prince et de belles princesses sans défaut, ils auront tendance, à l'âge adulte, à faire le choix de l'amour passion (qui par définition même est voué à être éphémère : voir pour ce thème le Carpe Diem ou le dialogue de Socrate avec Alcibiade). 

Il y a je crois, des moments d'entente entre l'imagination et le réalisme ; la passion et la raison. Les tendances que l'on croit habituellement divergentes, arrivent à s'exprimer avec une entente étonnante. Le beau prince, la belle princesse sans défaut, nous semblent avoir tout autant leur place dans l'expression de la réalité, que les mille et une habitudes de l'autre avec lesquelles nous avons du mal à composer, mais qui peuvent raisonnablement s'inscrire dans notre apprentissage. C'est en quelque sorte, la fusion du poète et du philosophe.
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