Aristippe de cyrène a écrit: Silentio a écrit: A-t-on réellement besoin d'une contre-philosophie ? Les philosophes mineurs de l'histoire ont-ils été occultés par la main-mise universitaire sur l'ordre du discours et du savoir institué ? Je n'y crois pas une seule seconde.
D'autant plus que l'histoire du "oui il s'agit dans cette contre-histoire de mettre en lumière les philosophes oubliés" n'est en fait qu'un prétexte pour opposer les philosophe
s dit "classique
s" aux hédonistes.
Évitons à notre tour la caricature que nous ne manquerions pas de faire en nous précipitant. De toute façon Onfray est beaucoup plus consensuel qu'on ne le dit du côté de la philosophie "officielle". Dire qu'il produit une contre-philosophie ne revient pas à dire qu'il produit une anti-philosophie. Il cherche à éclairer autrement la scène philosophique, opposant au jour un contre-jour ; c'est plus une affaire de modulation que de réhabilitation de philosophes oubliés ou mineurs. Il y a de l'iconoclasme chez lui, il cherche à orienter les projecteurs sur les ombres portées des statues érigées par l'histoire de la philosophie, pour vulgariser des informations qui existent mais qu'on n'utilise pas ou peu, et qui sont peu diffusées. C'est du côté des raisons, ou des a priori, ou des partis pris ou des fondements de sa démarche qu'il faut regarder. Il me paraît sincère, mais il y a quelque chose de paranoïaque là-dedans. Comme si on cherchait à nous cacher des choses qu'il aurait, lui, la mission de divulguer ! Évidemment que les modes d'institution de la philosophie, et de la culture d'une manière générale, ne sont pas irréprochables. Mais il est beaucoup plus que réducteur quand il voudrait faire des institutions les chaires d'un catéchisme qui ne dit pas son nom.
Mais ce n'est pas qu'une affaire de paranoïa. Ce qui invalide purement et simplement sa démarche, à mon sens, c'est qu'on n'a pas besoin de lui pour obtenir les informations qu'il donne. Par exemple, concernant Jules Ferry, il suffit d'ouvrir certains manuels scolaires pour trouver des extraits de ses discours colonialistes au nom de la civilisation. On pourrait multiplier les exemples. Bref, Onfray est consensuel, ou plutôt consensualiste, en affirmant toujours un "juste milieu" (ah, le juste milieu !...) pour défendre ou promouvoir sa démarche, mais c'est fait de façon à recréer un manichéisme doux et mou, comme le font beaucoup de démagogues (ce qu'il est). En gros, il apprend des choses ; une fois qu'il les a apprises, il est étonné de constater qu'il ne les savait pas avant et, fort de cette découverte, il se dit qu'on cache des choses, alors il les "révèle", non sans une certaine candeur, comme si tout le monde ignorait nécessairement les choses qu'il ignore lui-même au moment où et tant qu'il les ignore, comme si tout le monde ne pouvait savoir ce qu'il sait lui-même qu'à partir du moment où il les a apprises. D'où ce côté (vrai) historien de la (vraie) philosophie qu'il a et qu'on lui prête volontiers, d'où une certaine propension chez lui à inventer des réalités historiques qui n'en sont pas vraiment (sans être un "mythomane" ou un menteur ; Onfray n'est pas un charlatan et n'est pas l'auteur d'énormités).
Mais, au total, Onfray existe et, ma foi, on n'a pas affaire à un imposteur ou à un hérétique ; ce qu'il a fait ou ce qu'il fait satisfait beaucoup de personnes. Ça compte quand même. Ce qui me gène, c'est le côté de plus en plus flatteur de son discours aux yeux de plus en plus de personnes. Ça contribuera, sans doute un peu plus qu'un peu, à terme, à augmenter et à renforcer l'armée des bien-pensants, ceux-là mêmes qui croient, souvent, qu'ils sont du bon côté, et que, cerise sur le gâteau, être du bon côté, c'est être à côté, à la marge, à la périphérie (autrement dit exactement là où lorgnent toujours les publicitaires), donc là où on est préservé des mensonges et du mal que produisent et qu'inoculent les "centres" (institutions, autorités), au moins potentiellement mauvais et mensongers...
Aristippe de cyrène a écrit: on a l'impression qu'il mène une guerre acharnée pour le triomphe de l'hédonisme...
Disons qu'il veut démocratiser les jouissances du "bourgeois", embourgeoiser l'autre du bourgeois. C'est un jouisseur, pas un hédoniste. Un jouisseur ouvert, démocrate, partageur, qui veut qu'on jouisse avec lui.