La société corrompt-elle les hommes (cf. Rousseau) ? Mais pouvons-nous vivre autrement qu'en société ?
Le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire : Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux, ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : "Gardez-vous d'écouter cet imposteur ; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à personne."
Les choses en cet état eussent pu demeurer égales, si les talents eussent été égaux, et que, par exemple, l'emploi du fer et la consommation des denrées eussent toujours fait une balance exacte ; mais la proportion que rien ne maintenait fut bientôt rompue ; le plus fort faisait plus d'ouvrage ; le plus adroit tirait meilleur parti du sien ; le plus ingénieux trouvait des moyens d'abréger le travail ; le laboureur avait plus besoin de fer, ou le forgeron plus besoin de blé, et en travaillant également, l'un gagnait beaucoup tandis que l'autre avait peine à vivre
cassio a écrit:la vision idyllique qu'a Rousseau de l'homme à l'état de nature me laisse particulièrement perplexe. Déjà, il n'est pas évident que cet état de nature ait existé chez l'homme (difficile de dire à quel moment l'homme quitte l'état de nature)
Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes a écrit:Il n'est pas même venu dans l'esprit de la plupart des nôtres de douter que l'État de Nature eût existé, tandis qu'il est évident [...] que le premier Homme [...] n'était point lui-même dans cet état, et [...] il faut nier que [...] les Hommes se soient jamais trouvés dans le pur État de Nature, à moins qu'ils n'y soient retombés par quelque Événement extraordinaire : Paradoxe fort embarrassant à défendre, et tout à fait impossible à prouver.
Commençons donc par écarter tous les faits, car ils ne touchent point à la question. Il ne faut pas prendre les Recherches dans lesquelles on peut entrer sur ce Sujet, pour des vérités historiques, mais seulement pour des raisonnements hypothétiques et conditionnels ; plus propres à éclaircir la Nature des choses, qu'à en montrer la véritable origine, et semblables à ceux que font tous les jours nos Physiciens sur la formation du Monde.
cassio a écrit:par ailleurs j'ai beaucoup de difficultés à admettre que l'homme à l'état sauvage soit forcément bon.
Laissant donc tous les livres scientifiques qui ne nous apprennent qu'à voir les hommes tels qu'ils se sont faits, et méditant sur les premières et plus simples opérations de l'Âme humaine, j'y crois apercevoir deux principes antérieurs à la raison, dont l'un nous intéresse ardemment à notre bien-être et à la conservation de nous-mêmes, et l'autre nous inspire une répugnance naturelle à voir périr ou souffrir tout être sensible et principalement nos semblables.
cassio a écrit:le sentiment de propriété sur le fruit de son travail est peut-être inné chez l'homme (si j'ai capturé un lièvre, cueilli un kg de pommes, ou pêché un poisson, je ne serai pas très content si on vient me les prendre)
Rousseau a écrit:D'autres ont parlé du Droit Naturel que chacun a de conserver ce qui lui appartient, sans expliquer ce qu'ils entendaient par appartenir
cassio a écrit:il semble avoir un problème avec le fait que le kg de fer vaille plus que le kg de blé, ou le travail du mineur ou du forgeron plus ou moins que celui du cultivateur, or toutes les compétences ne sont pas également rares ni recherchées, de même que s'il se trouve un inventeur ingénieux pour fabriquer le même objet avec moins d'efforts, il rend service à la collectivité (il est vrai que pour Rousseau, avoir plus de biens est une source de perversion.
cassio a écrit:Quelle est la postérité de l'ouvrage ?
cassio a écrit:Y a-t-il des critiques (positives ou négatives) de philosophes qui me donneraient des pistes pour mieux appréhender les théories de Rousseau ?