cyr8 a écrit:Voici les romans de philosophes (ou apparentés) qui me sont venus vaguement à l'esprit : Les mots de Jean-Paul Sartre, L'étranger d'Albert Camus (non lu), Oscar et la dame rose d'Eric Emmanuel Schmitt, et plus particulièrement La mort de Virgile d'Hermann Broch.
Sont-ils des romans philosophiques ou engagés, ou autre ? À partir du moment où le roman peut être lu tout en ignorant la ou les visées philosophiques c'est qu'il n'est pas philosophique, si je comprends bien.
Bonjour,
Les mots sont une œuvre autobiographique, pas un roman (et c'est probablement l'une des meilleures productions littéraires de [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]).
L'étranger s'inscrit dans un ensemble d'œuvres diverses (un essai philosophique avec Le Mythe de Sisyphe, et deux pièces de théâtre : Caligula et Le Malentendu). Cet ensemble forme ce que Camus appelle "Le cycle de l'absurde". Il serait réducteur de ne voir dans ce roman qu'une illustration de l'existentialisme et de l'absurde (cf. le statut du personnage de Meursault, pas de prénom, etc.). Pour autant, c'est et ça reste un roman. Le mieux est encore de lire ce qu'en dit Sartre dans Situations I (1947).
Vous pouvez télécharger ci-dessous Les Mots et l'article de Sartre sur L'étranger.
Quant au roman de Schmitt, il s'inscrit dans un cycle de six romans (il y en aura encore 2), "Le Cycle de l'invisible". On peut certes parler de littérature argumentative, mais pas philosophique (on y trouve sans doute une influence du XVIIIe siècle, qui aimait mélanger les genres).
Enfin, La Mort de Virgile tient de l'allégorie, et compte tenu de la nature de l'œuvre de Broch, on peut lui accorder une dimension "philosophique", s'il s'agit de dire qu'elle reprend une tradition littéraire antique et notamment latine dont la dimension morale est essentielle - les mots contre les armes (on peut le lire chez Cicéron, notamment dans une œuvre aussi canonique que son De Oratore ou Trois dialogues sur l'orateur, par exemple en I, 30 et sqq. ; ou en I, 50 et sqq. Cf. aussi Tite-Live, Salluste, etc.).
La différence entre roman et philosophie est manifeste. Partez du principe que la philosophie n'est qu'un mode de la pensée parmi d'autres, et que penser ne signifie pas obligatoirement pratiquer la philosophie.
Cdt.
Fichiers joints