Il m’a semblé judicieux de séparer tout le travail fait aux sources d’une pensée de l’existence des philosophies existentielles qui seront traitées et dont voici le plan.
L’existence comme posture : Kierkegaard
L’existence comme possible : Jaspers
L’existence comme corporéité : Gabriel Marcel
L’existence comme facticité et liberté : Sartre
L’existence comme révolte et jouissance : Camus
I. Kierkegaard ou l’existence comme posture
L'existence de par son étymologie est un terme qui implique l'idée d'extériorité et particulièrement d'extériorité à soi : ex-sistere.
Mais cette idée d'extériorité à soi implique à son tour l'idée d'un rapport à soi, exister c'est nécessairement rentrer en rapport avec soi-même. Non pas être, être n'est pas possible donc forcément ce que nous sommes, où ce que nous serons, sera la résultante de ce rapport à soi. Nous sommes nécessairement en rapport avec nous-mêmes, devons soutenir ce rapport à soi. Cette relation n'est pas d'ordre logique, elle implique au contraire deux plans. D'abord une dimension ontologique et métaphysique mais aussi une dimension éthique.
Concernant cette dimension éthique, ce rapport à soi il nous appartient de l'édifier, de le construire. Il nous appartient de le choisir. Ceci revient à dire il nous appartient de nous choisir c'est-à-dire de nous faire exister en nous donnant telle ou telle forme. S'indique déjà l'un des grands thèmes de la philosophie sartrienne.
Cette idée que nous devons nous choisir, choisir le rapport que nous devons entretenir avec nous-mêmes, donc nous choisir, donc nous faire exister sous telle forme ou au contraire sous telle autre forme, montre effectivement quelle est la différence énorme, le fossé qui sépare ces deux termes que le langage courant confond souvent, c'est-à-dire vie et existence.
Si la vie renvoie à une idée de processus physico-chimiques, que nous partageons avec l'ensemble du vivant, qui nous achemine vers la mort, si du point de vue de la vie la mort est un phénomène parfaitement naturel représentant le terme, la fin naturelle de toute vie particulière, l'on peut dire qu'en revanche elle figure le commencement de notre existence. Non pas d'un point de vue religieux, ce n'est pas l'idée religieuse qui est qu'il nous faut mourir dans notre vie, d'être incarné pour accéder à la vraie vie.
D'un point de vue strictement philosophique c'est l'idée que parce que nous développons une très haute conscience de notre caractère d'être mortel, que nous avons conscience qu'il faudra mourir un jour, que ce terme, rétroactivement, nous contraint à faire des projets. C'est bien la mort qui constitue la condition de possibilité de l'idée même de projet.
Si nous faisons des projets, si nous pouvons nous décrire nous-mêmes comme un ensemble de projets, ces projets ne sont possibles, et sur le plan de la pensée, sur le plan logique compréhensibles, que référés à la mort. Une vie immortelle, une vie qui n'aurait pas de fin n'aurait pas la moindre nécessité de construire le moindre projet. Nous nous laisserions vivre et de ce point de vue nous raterions notre existence.
Autant la mort est le terme naturel de la vie pour chaque être vivant, autant elle va être considérée pour l'ensemble des philosophies existentielles comme le point de départ de l'existence, puisque c'est cette connaissance de ma propre mort inéluctable qui va m'amener à me projeter dans l'avenir que je sais limité, et à délimiter d'une façon libre, la plus libre possible, des séquences de ce temps, et cette délimitation est ce que l'on appelle le projet.
La vie est essentiellement vie de l’espèce par rapport à quoi la vie individuelle, la vie de tel être vivant ou de tel autre apparaît comme transitoire. L'individu est le moyen par lequel l'espèce se maintient en vie. Dure loi biologique. L'individu est la ruse de l'espèce.
L'espèce qui est en droit immortelle, mais qui périt lors de cataclysmes et de mutations, ce que l'on appelle des accidents, est sur un plan purement génétique programmée pour durer indéfiniment.
Comment une espèce peut-elle se maintenir en vie ?
En se servant de l'individu qui est mortel mais sexué, d'où la relation puissante entre mort et sexualité, qui le contraint par là à se reproduire c'est-à-dire à renouveler la vie de l'espèce. Les choses se passent ainsi du point de vue de la vie.
L'existence au contraire est strictement individuelle.
La vie est faiblement individuée, elle passe par la fabrication permanente d'individus, mais l'individu n'est pas le terme de la vie.
L'existence est nécessairement individuelle. Nul ne peut exister à ma place et chacun a le droit de se concevoir comme une entité unique, singulière. Mais cette singularité que nous revendiquons n'est pas sans ambivalence.
Bien sûr cela va nous acheminer vers une très grande recherche d'autonomie, donc de liberté possible, nous livrer dans une très grande vulnérabilité car nu et seul devant la mort.
On ne comprend rien à la problématique moderne de l'existence si on ne la relie pas à la mort, à ce que l'on pourrait appeler plus exactement la conscience de la mort.
Cette vulnérabilité extrême de ce que l'on peut appeler l'existant se vit dans l'angoisse, thème commun à tous les existentialistes, dans la déréliction, thème essentiellement camusien.
Le terme de déréliction signifie sentiment que l'existence est absurde. Non pas mon existence propre parce que j'ai raté ma vie, mais l'idée que l'existence en tant que telle, l'existence humaine, puisqu'il n'y a d'existence que pour l'homme, est fondamentalement dépourvue de sens.
C'est tout le thème de l'absurde chez Camus où il va me montrer que si l'on ne s'est pas confronté à la déréliction, non pas d'une façon permanente mais sous forme d'expérience existentielle, on ne peut pas véritablement se construire. On se construira mais d'une façon artificielle, fausse.
Ce terme de déréliction a une très forte connotation existentielle mais davantage lié aux réflexions et à la méditation de Camus.
On comprend que l'expérience de l'angoisse ou de la déréliction sont des expériences humaines, fondamentales, nécessaires. Sans elles nous ne parviendrions pas à constituer notre humanité.
On ne peut ici que souligner la différence entre le sort humain, le sort dévolu à l'être humain, et le sort de cet autre vivant qu'est animal, puisque l'animal en effet ne se définit que par son espèce.
En lui c'est l'espèce qui parle bien plus que l'individu, d'où l'idée que comme une espèce évolue peu, il n'y a pratiquement pas de progrès chez l'animal. Si progrès il y a, il se fait par sélection naturelle mais pas par contribution d'un apport d'individu à individu. « L'espèce ne vieillit jamais » Schopenhauer : Métaphysique de l'amour, métaphysique de la mort.
En effet l'espèce vit dans une certaine forme d'éternité alors que nous sommes découpés dans le temps comme dans l'espace. Telle est la tragédie de toute existence mais peut-être aussi sa chance, voir son salut. C'est ce paradoxe qu’il faut essayer de comprendre en s'aidant de la lecture de Kierkegaard.
Cette existence qu'il nous faut donc puisque nous ne pouvons pas nous contenter de vivre, mais qu'il nous faut tenter d'exister, cette existence qu'il nous faut promouvoir, peut-on la décrire sous forme de continuum ou au contraire doit-on admettre que nécessairement pour se construire elle doit en passer par des moments, ce que Kierkegaard appellera des stades ?
Chacun de ces stades se marquant par une certaine conception de l'existence, une certaine manière de se comporter, en un mot une certaine posture.
Il faut entendre par posture deux choses qui nous ramènent à une ambivalence, que nous retrouverons dans tous les propos de Kierkegaard. La posture est à la fois quelque chose qui nous protège, c'est une sorte de masque, d'armure que nous revêtons par une gestualité, par une façon de configurer l'espace autour de nous, de nous tenir dans cet espace, avec l'idée que ceci est tout à fait conscient.
La posture est quelque chose qui est travaillé, qui n'est pas hasardeux, et qui tend à autrui une image, une représentation de nous dont il va s'abreuver.
C'est du moins l'espoir de celui qui tient une posture pour ménager un espace intérieur dans lequel éventuellement on peut vivre tout à fait autre chose. La posture a une fonction apotropaïque, c'est-à-dire une fonction de protection, une fonction de protection qui vise à préserver le moi profond qui est bien trop fragile, bien trop vulnérable pour pouvoir se montrer à nu. C'est la première dimension, le premier sens de cette idée de posture.
Mais la posture est également ce qui transcende mon être. La posture c'est quelque chose qui est de l'ordre d'une forme que j'invente, que j'ai choisi, que j'ai construit avec l'idée que je puis en changer donc je ne suis jamais emprisonné définitivement dans une seule posture. Cette possibilité de trouver des postures, d'en changer ramène à une certaine idée de la transcendance parce que cela veut dire que par-là j'essaye de faire bouger ce que je vis et ce que j'expérimente néanmoins comme étant mes limites propres.
Par l'ensemble des postures qui seront les miennes, je fais sans arrêt bouger les limites qui doivent exister pour que j'existe moi-même et que je sois une entité réellement existante. Sans limites je me dissous.
Il va falloir garder pour Kierkegaard l'idée que la posture accomplit toujours deux choses : à la fois elle va protéger, elle sera forcément du côté de l'artifice, de l'hypocrisie, le cynisme, la séduction, donc fonction apotropaïque très importante, mais de l'autre côté elle montre cette espèce extraordinaire mobilité de notre être qui peut sans arrêt inventer des formes à l'intérieur desquelles une partie de l'huis tient, qui peut jouer avec ces formes, passer d'une forme à l'autre sans que jamais une seule posture à elle toute seule puisse prétendre épuiser ce que nous sommes.
Dans la posture, dans cette configuration de notre être il y a un mouvement de transcendance.
C'est une idée très importante que l'on retrouvera chez Sartre même s'il abandonnera l'idée de posture, mais l'idée qui restera, que l'on trouvera stigmatisée au sein de la mauvaise foi, à l'intérieur de cette idée sartrienne de la mauvaise foi, c'est qu'il nous faut toujours improviser pour être. Il y a un lien qui par-delà la posture va nous amener dans une philosophie tout à fait athée.
Il y a une telle osmose entre la vie de l'individu Kierkegaard et l'élaboration de sa pensée que l'on est obligé de donner brièvement un certain nombre d'éléments biographiques.
L’existence comme posture : Kierkegaard
L’existence comme possible : Jaspers
L’existence comme corporéité : Gabriel Marcel
L’existence comme facticité et liberté : Sartre
L’existence comme révolte et jouissance : Camus
I. Kierkegaard ou l’existence comme posture
L'existence de par son étymologie est un terme qui implique l'idée d'extériorité et particulièrement d'extériorité à soi : ex-sistere.
Mais cette idée d'extériorité à soi implique à son tour l'idée d'un rapport à soi, exister c'est nécessairement rentrer en rapport avec soi-même. Non pas être, être n'est pas possible donc forcément ce que nous sommes, où ce que nous serons, sera la résultante de ce rapport à soi. Nous sommes nécessairement en rapport avec nous-mêmes, devons soutenir ce rapport à soi. Cette relation n'est pas d'ordre logique, elle implique au contraire deux plans. D'abord une dimension ontologique et métaphysique mais aussi une dimension éthique.
Concernant cette dimension éthique, ce rapport à soi il nous appartient de l'édifier, de le construire. Il nous appartient de le choisir. Ceci revient à dire il nous appartient de nous choisir c'est-à-dire de nous faire exister en nous donnant telle ou telle forme. S'indique déjà l'un des grands thèmes de la philosophie sartrienne.
Cette idée que nous devons nous choisir, choisir le rapport que nous devons entretenir avec nous-mêmes, donc nous choisir, donc nous faire exister sous telle forme ou au contraire sous telle autre forme, montre effectivement quelle est la différence énorme, le fossé qui sépare ces deux termes que le langage courant confond souvent, c'est-à-dire vie et existence.
Si la vie renvoie à une idée de processus physico-chimiques, que nous partageons avec l'ensemble du vivant, qui nous achemine vers la mort, si du point de vue de la vie la mort est un phénomène parfaitement naturel représentant le terme, la fin naturelle de toute vie particulière, l'on peut dire qu'en revanche elle figure le commencement de notre existence. Non pas d'un point de vue religieux, ce n'est pas l'idée religieuse qui est qu'il nous faut mourir dans notre vie, d'être incarné pour accéder à la vraie vie.
D'un point de vue strictement philosophique c'est l'idée que parce que nous développons une très haute conscience de notre caractère d'être mortel, que nous avons conscience qu'il faudra mourir un jour, que ce terme, rétroactivement, nous contraint à faire des projets. C'est bien la mort qui constitue la condition de possibilité de l'idée même de projet.
Si nous faisons des projets, si nous pouvons nous décrire nous-mêmes comme un ensemble de projets, ces projets ne sont possibles, et sur le plan de la pensée, sur le plan logique compréhensibles, que référés à la mort. Une vie immortelle, une vie qui n'aurait pas de fin n'aurait pas la moindre nécessité de construire le moindre projet. Nous nous laisserions vivre et de ce point de vue nous raterions notre existence.
Autant la mort est le terme naturel de la vie pour chaque être vivant, autant elle va être considérée pour l'ensemble des philosophies existentielles comme le point de départ de l'existence, puisque c'est cette connaissance de ma propre mort inéluctable qui va m'amener à me projeter dans l'avenir que je sais limité, et à délimiter d'une façon libre, la plus libre possible, des séquences de ce temps, et cette délimitation est ce que l'on appelle le projet.
La vie est essentiellement vie de l’espèce par rapport à quoi la vie individuelle, la vie de tel être vivant ou de tel autre apparaît comme transitoire. L'individu est le moyen par lequel l'espèce se maintient en vie. Dure loi biologique. L'individu est la ruse de l'espèce.
L'espèce qui est en droit immortelle, mais qui périt lors de cataclysmes et de mutations, ce que l'on appelle des accidents, est sur un plan purement génétique programmée pour durer indéfiniment.
Comment une espèce peut-elle se maintenir en vie ?
En se servant de l'individu qui est mortel mais sexué, d'où la relation puissante entre mort et sexualité, qui le contraint par là à se reproduire c'est-à-dire à renouveler la vie de l'espèce. Les choses se passent ainsi du point de vue de la vie.
L'existence au contraire est strictement individuelle.
La vie est faiblement individuée, elle passe par la fabrication permanente d'individus, mais l'individu n'est pas le terme de la vie.
L'existence est nécessairement individuelle. Nul ne peut exister à ma place et chacun a le droit de se concevoir comme une entité unique, singulière. Mais cette singularité que nous revendiquons n'est pas sans ambivalence.
Bien sûr cela va nous acheminer vers une très grande recherche d'autonomie, donc de liberté possible, nous livrer dans une très grande vulnérabilité car nu et seul devant la mort.
On ne comprend rien à la problématique moderne de l'existence si on ne la relie pas à la mort, à ce que l'on pourrait appeler plus exactement la conscience de la mort.
Cette vulnérabilité extrême de ce que l'on peut appeler l'existant se vit dans l'angoisse, thème commun à tous les existentialistes, dans la déréliction, thème essentiellement camusien.
Le terme de déréliction signifie sentiment que l'existence est absurde. Non pas mon existence propre parce que j'ai raté ma vie, mais l'idée que l'existence en tant que telle, l'existence humaine, puisqu'il n'y a d'existence que pour l'homme, est fondamentalement dépourvue de sens.
C'est tout le thème de l'absurde chez Camus où il va me montrer que si l'on ne s'est pas confronté à la déréliction, non pas d'une façon permanente mais sous forme d'expérience existentielle, on ne peut pas véritablement se construire. On se construira mais d'une façon artificielle, fausse.
Ce terme de déréliction a une très forte connotation existentielle mais davantage lié aux réflexions et à la méditation de Camus.
On comprend que l'expérience de l'angoisse ou de la déréliction sont des expériences humaines, fondamentales, nécessaires. Sans elles nous ne parviendrions pas à constituer notre humanité.
On ne peut ici que souligner la différence entre le sort humain, le sort dévolu à l'être humain, et le sort de cet autre vivant qu'est animal, puisque l'animal en effet ne se définit que par son espèce.
En lui c'est l'espèce qui parle bien plus que l'individu, d'où l'idée que comme une espèce évolue peu, il n'y a pratiquement pas de progrès chez l'animal. Si progrès il y a, il se fait par sélection naturelle mais pas par contribution d'un apport d'individu à individu. « L'espèce ne vieillit jamais » Schopenhauer : Métaphysique de l'amour, métaphysique de la mort.
En effet l'espèce vit dans une certaine forme d'éternité alors que nous sommes découpés dans le temps comme dans l'espace. Telle est la tragédie de toute existence mais peut-être aussi sa chance, voir son salut. C'est ce paradoxe qu’il faut essayer de comprendre en s'aidant de la lecture de Kierkegaard.
Cette existence qu'il nous faut donc puisque nous ne pouvons pas nous contenter de vivre, mais qu'il nous faut tenter d'exister, cette existence qu'il nous faut promouvoir, peut-on la décrire sous forme de continuum ou au contraire doit-on admettre que nécessairement pour se construire elle doit en passer par des moments, ce que Kierkegaard appellera des stades ?
Chacun de ces stades se marquant par une certaine conception de l'existence, une certaine manière de se comporter, en un mot une certaine posture.
Il faut entendre par posture deux choses qui nous ramènent à une ambivalence, que nous retrouverons dans tous les propos de Kierkegaard. La posture est à la fois quelque chose qui nous protège, c'est une sorte de masque, d'armure que nous revêtons par une gestualité, par une façon de configurer l'espace autour de nous, de nous tenir dans cet espace, avec l'idée que ceci est tout à fait conscient.
La posture est quelque chose qui est travaillé, qui n'est pas hasardeux, et qui tend à autrui une image, une représentation de nous dont il va s'abreuver.
C'est du moins l'espoir de celui qui tient une posture pour ménager un espace intérieur dans lequel éventuellement on peut vivre tout à fait autre chose. La posture a une fonction apotropaïque, c'est-à-dire une fonction de protection, une fonction de protection qui vise à préserver le moi profond qui est bien trop fragile, bien trop vulnérable pour pouvoir se montrer à nu. C'est la première dimension, le premier sens de cette idée de posture.
Mais la posture est également ce qui transcende mon être. La posture c'est quelque chose qui est de l'ordre d'une forme que j'invente, que j'ai choisi, que j'ai construit avec l'idée que je puis en changer donc je ne suis jamais emprisonné définitivement dans une seule posture. Cette possibilité de trouver des postures, d'en changer ramène à une certaine idée de la transcendance parce que cela veut dire que par-là j'essaye de faire bouger ce que je vis et ce que j'expérimente néanmoins comme étant mes limites propres.
Par l'ensemble des postures qui seront les miennes, je fais sans arrêt bouger les limites qui doivent exister pour que j'existe moi-même et que je sois une entité réellement existante. Sans limites je me dissous.
Il va falloir garder pour Kierkegaard l'idée que la posture accomplit toujours deux choses : à la fois elle va protéger, elle sera forcément du côté de l'artifice, de l'hypocrisie, le cynisme, la séduction, donc fonction apotropaïque très importante, mais de l'autre côté elle montre cette espèce extraordinaire mobilité de notre être qui peut sans arrêt inventer des formes à l'intérieur desquelles une partie de l'huis tient, qui peut jouer avec ces formes, passer d'une forme à l'autre sans que jamais une seule posture à elle toute seule puisse prétendre épuiser ce que nous sommes.
Dans la posture, dans cette configuration de notre être il y a un mouvement de transcendance.
C'est une idée très importante que l'on retrouvera chez Sartre même s'il abandonnera l'idée de posture, mais l'idée qui restera, que l'on trouvera stigmatisée au sein de la mauvaise foi, à l'intérieur de cette idée sartrienne de la mauvaise foi, c'est qu'il nous faut toujours improviser pour être. Il y a un lien qui par-delà la posture va nous amener dans une philosophie tout à fait athée.
Il y a une telle osmose entre la vie de l'individu Kierkegaard et l'élaboration de sa pensée que l'on est obligé de donner brièvement un certain nombre d'éléments biographiques.