Liber a écrit: Tous les labs quels qu'ils soient ont les mêmes analyses, que vous preniez des journaux de droite comme le JDD ou de gauche comme Le Monde.
Les chiffres varient en fonction des modes de calcul, des paramètres, etc. Ensuite, des chiffres identiques prêtent le plus souvent à des interprétations diverses, voire opposées. Enfin, on reste très loin du compte quand on se contente de ne confronter que ce qui a été dit à ce qui a été fait par les uns et les autres. Il y manque la plupart du temps les éléments contextuels, le passage en revue de toutes les circonstances, etc. La seule naïveté ici, et qui tient tout autant du ridicule que de la prétention, c'est de croire que la vérité se réduit à ravaler les discours politiques à des actes au motif que les actes seraient le critère ultime. Motif de puceau, motif de qui n'a pas vécu, de qui vit "sans histoire". Quand on vit, on dit des choses, et on ne les fait pas, pour des tas de raisons, qui toutes montrent qu'on n'a jamais fini de s'accommoder du réel, d'apprendre à vivre en faisant avec. Ni menteurs, ni médiocres, ni quoi que ce soit : on fait ce qu'on peut, d'abord, et c'est beaucoup, mais ce n'est presque jamais assez. La vie politique est autrement plus compliquée. Les journalistes le savent. Dès lors, on ne voit pas pourquoi il faudrait juger des hommes qui ont plus de responsabilités que les autres avec le simplisme niais de qui attend une soi-disant vérité quand, non seulement la vérité n'est jamais réductible à ça, mais la plupart des gens mentent sans que ça leur torture la conscience. Dernière remarque : l'habitude des journalistes est ici très voisine de la tactique du menteur : on fait voir, on met sous les yeux des choses, pour mieux dissimuler l'important, ou pour détourner le regard. Rien n'est plus efficace que de faire voir quelque chose pour ne rien montrer, comme avec les magiciens, qui ne mentent jamais. C'est la même chose avec les journalistes, mais eux prétendent dire le vrai, prétendent avoir le souci du vrai. Comme si informer consistait à énoncer le vrai - essayez donc de réduire les philosophes, que la vérité anime par définition, au rôle d'informateurs ; on ne parle pas d'information philosophique ! Au total, quand on entend quelqu'un prétendre que les hommes politiques sont des menteurs, on sait qu'il n'a rien compris à la chose politique. Ne reste alors qu'à tourner les talons.
Liber a écrit: rien que le nom du site est tout un programme...
Quand on a chanté la chanson du "Moi... je", il faut s'attendre à faire l'objet de bien des programmes et caricatures. Ou bien croyez-vous que les caricatures doivent toujours être les mêmes (Sarkozy et consorts) ?
Liber a écrit: je vous imaginais féru de tactique politique, lisant tous les journaux, écoutant C dans l'air, DPDA, LCI, Itélé, BFMTV, etc. J'apprécie des journalistes comme Barbier ou Zemmour, pourtant de droite, mais objectifs. Eh oui, l'affreux gauchiste que je suis apprécie des journalistes de droite ! Curieux non ? Le seul journal que je ne lis pas est le Figaro. Pourquoi ? Parce qu'il n'est pas objectif, tout simplement.
Je regarde beaucoup ces émissions ou ces chaînes, mais je ne lis plus que très rarement les quotidiens, plutôt les magazines d'information, mais avec une extrême méfiance. On n'a rien, chez nous, qui puisse se comparer, même de loin, à des quotidiens comme
la Repubblica en Italie et tant d'autres. C'est le jour et la nuit. Vous ne lisez pas le Figaro ? Alors vous n'avez pas accès aux analyses qu'y publient Pierre Manent, Marcel Gauchet et d'autres, et dont la différence avec les journalistes est plus que saisissante.
Liber a écrit: Dès fois je me demande si vous êtes de droite.
C'est quand même dingue de devoir le répéter aussi souvent. On n'a pas affaire à un problème de droite ou de gauche. Historiquement, deux tendances lourdes émergent au XVIIIe siècle, qui ne disparaîtront plus et qui se distribueront dans chaque pays selon des circonstances locales. Le
contractualisme ; la
théorie du marché. Le contractualisme est évidemment une racine essentielle de la gauche. Mais ça l'est tout autant de la droite, puisque le contractualiste pense à partir de l'individu, qui lui sert d'unité logico-sociale. La théorie du marché, de même, est une racine essentielle des deux "camps". Bref, avec ces deux tendances, vous disposez de vrais éléments qui englobent en les expliquant les partis et les affaires politiques (de France et d'ailleurs). Lisez Lucien Jaume. Comme avec Gauchet et quelques autres, vous saisirez immédiatement la différence entre la "réalité journalistique" et la réalité politique (j'y intègre les actualités).
Liber a écrit: Seule l'égalité compte. La redistribution est un choix. On ne peut évidemment pas critiquer ceux qui produisent les richesses à redistribuer. Par contre, on peut, et c'est la position de la gauche, critiquer les très grands revenus
Beaucoup à droite et au centre font la même critique. Ce n'est pas une position de gauche ou de droite. La position de la gauche consiste à dire que l'égalité prime la liberté, au moins en ceci qu'elle la détermine, qu'elle en est une condition, et elle est une exigence. La droite, qui a les mêmes valeurs, privilégie la liberté. Elle est plus
politique, quand la gauche est plus
économiste. C'est flagrant dès le départ (cf. les années 1830-1840). Tôt ou tard on reviendra à la classe moyenne comme "curseur" fiable, comme échelle de mesure permettant de juger si quelqu'un gagne "trop". Ce n'est pas une question d'inégalité. C'est une question de proportion, de réalisme : quand quelqu'un gagne 20 millions d'euros par an, il n'existe aucun référent objectif pour s'expliquer tout seul, comme un grand, à quoi ça peut correspondre. On a donc affaire à un salopard. Il faut non seulement le gronder, mais le virer. Mais même en supposant l'avoir grondé et viré, on n'en est pas plus de gauche pour autant.
Dernière édition par Euterpe le Mar 21 Nov 2017 - 22:48, édité 1 fois