Silentio a écrit:J'aime bien ceci :Jules Simon a écrit:Quand il était fatigué du travail, son divertissement consistait, dit l’honnête et exact Colerus, « à fumer une pipe de tabac, ou bien, lorsqu’il voulait se relâcher l’esprit un peu plus long-temps, il cherchait des araignées qu’il faisait battre ensemble ou des mouches qu’il jetait dans la toile d’araignée, et regardait ensuite cette bataille avec tant de plaisir, qu’il éclatait quelquefois de rire. »
Cette pratique de combat d'insectes (ou d'arachnides) existe encore. Euterpe m'avait néanmoins dit que cette anecdote était pure invention. Ce n'est pourtant pas la première fois que je la lis.
Liber a écrit:Cette pratique du combat d'insectes (ou d'arachnides) existe encore. Euterpe m'avait néanmoins dit que cette anecdote était pure invention. Ce n'est pourtant pas la première fois que je la lis.
Il me semble qu'elle vient de son disciple.
Silentio a écrit:pourquoi un disciple inventerait-il cette anecdote alors qu'elle pourrait nuire, par sa cruauté, à Spinoza ?
Cette anecdote ne vient pas d'un disciple (Jean Maximilien Lucas, biographie publiée d'abord en 1719), mais de Jean Colerus (Johannes Colerus). Jules Simon s'y prend d'une manière qui devrait vous mettre la puce à l'oreille : "l'honnête et exact Colerus"... Procédé journalistique très répandu dès le XIXe siècle, d'autant plus que les journalistes ne donnent pas leurs sources, ce qui implique quelques arrangements avec l'argumentation. Quant à ce Colerus, il publia en 1706 La vérité de la résurrection de Jésus Christ, défendue contre B. de Spinosa et ses sectateurs, avec la vie de ce fameux philosophe, tirée tant de ses propres Écrits, que de la bouche de plusieurs personnes dignes de foi qui l'ont connu. Par Jean Colerus, Ministre de l'Église Luthérienne de La Haye. Avouez que le titre est autrement plus révélateur que celui de cette autre édition parue la même année : La Vie de B. de Spinosa, tirée des Écrits de ce fameux philosophe, et du témoignage de plusieurs personnes qui l'ont connu particulièrement (ou éd. de 1706 ici). Saisset ne s'est guère montré prudent, en ouvrant le 2e tome de son édition des Œuvres de Spinoza par la biographie de Colerus (écrite à charge, avec des remarques explicitement formulées pour décrédibiliser Spinoza) pour ne placer celle de Lucas qu'en deuxième (en appendice), justifiant son choix par cette pauvre remarque (note p. XLI) :
Nous donnons ici, comme appendice à l'écrit de Colerus, une autre Vie de Spinoza, moins importante, à coup sûr, mais bien curieuse encore [...].
La curiosité comme argument scientifique, tout de même... Or certains passages de Lucas laissent penser qu'en publiant son ouvrage en 1719, il souhaitait contribuer à réhabiliter Spinoza.
Mais même sans cette information, il devrait être évident pour un lecteur de Spinoza que l'anecdote est pure invention. Ça ne colle pas.
Dernière édition par Euterpe le Dim 24 Juil 2022 - 2:27, édité 6 fois