Pour vous, c'est un sophisme. C'est un fait que vous voyiez les choses ainsi, et je dois bien l'accepter.
Ah non. Pas "pour moi".
C'est un sophisme. Vous qui ne jurez que par Wikipedia, allez donc voir un peu là-bas.
Plus jamais je ne contesterai ce que vous dites.
??!!
je suggère que notre Moi n'est qu'une hallucination fabriquée par des neurones organisés en réseaux (neurones qui, eux, existent réellement)
L'idée que le moi serait une
hallucination "fabriquée par des neurones" est doublement ridicule. D'abord parce que, derechef, prétendre que des neurones "fabriquent" de l'
hallucination, c'est proférer le
sophisme de l'homoncule (c'est l'organisme vivant tout entier qui produit l'
hallucination, pas une de ses parties). Ensuite parce qu'une
hallucination est un phénomène psychique qui met en jeu la seule (pseudo-)
perception. Dans l'
hallucination le sujet "voit" (ou "entend" ou "sent", etc.) un "objet" inexistant pour tout autre que pour lui, et encore, au seul moment où il éprouve cette expérience. Si quelqu'un, de retour d'un pèlerinage à Lourdes, m'affirme avoir "vu" la Vierge Marie, je serai enclin à penser qu'il (ou elle) a été le jouet d'une
hallucination. En revanche, quel "objet" est censé être (faussement) perçu lorsque quelqu'un parle de son moi ? Dire que ce qui est en jeu ici est la perception d'un "objet", serait présupposer ce qui est à démontrer, à savoir que le moi possède une
réalité empirique (au moins à titre de représentation iconique à la manière de la Vierge Marie). Or, je ne sache pas que, contrairement aux dieux de l'Olympe et d'ailleurs, nul ne se soit jamais aventuré à "représenter" le moi !
Bref, si vous voulez dire que l'existence du moi est problématique, vous devez suggérer que le moi est une
illusion. Dans l'
illusion, en effet, ce qui est en jeu n'est pas, directement, la
perception mais, indirectement, la
croyance en la possibilité d'une
perception (Freud précisera : le
désir de croire en une perception possible)
. D'où, tandis que tous les êtres sensibles sont susceptibles d'être victimes d'
hallucination, seuls les êtres "pensants" (c'est-à-dire les hommes et "les êtres qui leur ressemblent"), en tant qu'ils sont capables d'avoir des
croyances, peuvent être dits avoir des
illusions. Raison pour laquelle l'
illusion est compatible avec le doute ou l'hésitation, tandis que l'
hallucination emporte adhésion sans réserve. C'est ainsi qu'il existe des
illusions perceptives portant sur la
croyance en l'existence empirique (perceptible) possible, quoique douteuse, des "objets" représentés (ex. des
illusions d'optique dans les tableaux d'Escher ou, simplement, de l'
illusion de profondeur dans la perspective des représentations bi-dimensionnelles). Bref, dire qu'un sujet S a l'
illusion d'un "objet" O, c'est dire que S
croit que l'existence
conceptuelle de O comme
objet de discours (comme "objet d'énonciation", dirait Lacan) est, sinon une preuve suffisante, du moins un indice de son
existence empirique comme
objet de perception ("objet d'énoncé" lacanien). L'"objet" de l'
illusion, contrairement à l'"objet" de l'
hallucination n'a d'existence réelle que
conceptuelle : il n'existe, indubitablement, que comme "objet" de discours alors même que personne n'a jamais perçu son
existence empirique, ni n'a jamais tenté d'en faire une représentation (ce qui distingue l'
illusion de l'
imagination et de l'
hypothèse). L'oasis dans le désert a une représentation empirique possible, elle existe empiriquement, même si le voyageur égaré est victime d'une hallucination lorsqu'il est persuadé d'en percevoir une (à cet égard, on ne dira pas qu'il "croit" la percevoir : il ne
croit rien du tout, il la "perçoit" -faussement- et c'est tout). Le moi (tout comme le développement durable, le bonheur, la paix, la liberté, etc.) en revanche, n'a jamais fait l'objet de quelque représentation picturale, imaginative ou scientifique que ce soit en dehors des discours qu'on tient à son propos.
Maintenant, si on dit que le moi est une
illusion dans le sens où nous avons tendance à croire qu'il existe un
substrat empirique possible pour le
schème conceptuel que nous mobilisons pour en parler, que veut-on dire exactement ? Autrement dit, de quel
schème conceptuel est-il question précisément ? De celui qui consiste, pour un sujet donné, à douter de sa propre existence empirique, à croire que sa propre existence empirique est
illusoire ? Le pyrrhonisme, mais aussi le Mahayana (le Grand Véhicule bouddhiste), Descartes, Calderon, Shakespeare, Schopenhauer, Modiano (pour n'en citer que quelques-uns) ont, à des degrés divers et avec des intentions très différentes, exploité ce filon. Est-ce à dire que le moi est
illusoire dans le sens où, comme l'ont fait Pascal, Hume, Freud, ou Proust, on a des raisons de douter de l'unicité de notre existence empirique ? Ou bien, à l'inverse, qu'on a de bonnes raisons de douter de la séparation du moi et de l'autre, du sujet d'avec son objet de pensée ou de perception, et ce, à l'instar de Spinoza ou de Patanjali ? Ou encore, c'est ce que fait Wittgenstein, aller jusqu'à douter que le terme "moi" n'ait qu'une seule acception possible ? Ou ...
PS : je n'ai pas évoqué la possibilité pour celui qui parle du moi de prendre ses interlocuteurs pour des c... ! Ce qui semble être le cas pour l'auteur que vous citez. Dire ""je" n'existe pas", n'est, évidemment pas dire "je n'existe pas", en espérant toutefois faire le
buzz et embrouiller l'esprit de mes lecteurs avec la confusion de la mention et de l'usage !