PhiPhilo a écrit:ou bien vous entendez par "énergie" ce que les physiciens y mettent communément, à savoir, pour un corps déterminé, le produit de sa masse par son accélération et par la distance qu'il parcourt (M.L^2.T^-2) et alors on ne comprend pas comment une entité "affective" (un quale) par hypothèse non réductible à une entité physique, peut posséder de l'"énergie" en ce sens
Bonjour Phiphilo,
Soyons simple tant que le problème est simple. Il y a tellement de complexité par ailleurs. Et puis essayons de se comprendre en se lisant bien, autant qu'on peut se lire. Vous savez comme moi qu'il y a plusieurs types d'énergie dont les physiciens parlent : l'énergie potentielle, l'énergie cinétique, l'énergie thermique, l'énergie électrique etc. Dans l'exemple évidemment analogique mais malgré tout il me semble instructif que j'utilise dans mon texte sur Dehaene, je parle de la transformation d'énergie qui se passe depuis l'onde électromagnétique parvenant à l'antenne d'un téléviseur jusqu'à l'image visible sur l'écran. Elle est successivement électromagnétique, électrique, cinétique puis lumineuse. Si je devais à chaque fois utiliser une formule de celle que vous transcrivez (et qui me paraît réservée à l'énergie cinétique), il est clair que je ne m'en sortirai pas. Je ne suis même pas sûr qu'un excellent physicien s'en sortirait. Je préfère donc utiliser une autre formule que je trouve simple et pratique, qui est celle que donne le Robert dans sa définition de l'énergie et qui est basée sur les travaux de Carnot : "caractéristique que possède un système s'il est capable de fournir un travail". Évidemment là le mot travail est aussi à prendre au sens physique du terme et peut être calculé à l'aide d'une formule algébrique.
Et je tiens le raisonnement suivant : ou le nématode n'est pas conscient et l'énergie, disons électromagnétique, que produit son système nerveux et musculaire est bien la cause du travail effectué dans la pirouette et accompagné d'une dépense d'énergie. Ou bien il est conscient et l'énergie électromagnétique n'est pas la cause de la pirouette parce que, s'il n'y avait pas dans son système psychique, avec l'intensité qu'il faut, le quale du mal-être, il n'y aurait pas de pirouette du tout. Je passe du nématode au coureur et je me recopie: "Tout se passe donc comme si l'énergie psychique n'était ni plus ni moins qu'une forme transformée de l'énergie au sens physique du mot. Elle est la caractéristique possédée par le système psychique qui lui permet de produire un travail. Si l’intensité du ressenti déplaisant n’existait pas, il n’y aurait pas de travail musculaire pour l’éviter. Notre coureur, atteint d’anosmie, continuerait sa route dans l’odeur nauséabonde ».
Bon, d’accord, me direz-vous peut-être, je veux bien que ce qu’il y a dans le système psychique soit la cause du travail effectué. Mais cette cause est un signal, une représentation, une forme, une entité qualitative je ne sais. Je n’y vois rien en tout cas qui puisse avoir un rapport avec une quantité d’énergie. Ben, si ! Y a quelque chose en rapport et ce rapport est justement de l’ordre de la quantité. Ce qu’il y a dans le système psychique est quantifiable de la précise façon dont une intensité est quantifiable.
Prenez ce seau. Il fait cent litres. Ah ! Ce n’est pas un failli seau mais vous m’avez l’air dur à convaincre. Il est vide pour l’instant et vous l’avez soulevé de terre, vous le tenez à bout de bras. Avec une casserole, je le remplis, litre par litre. Vous le tenez toujours en l’air mais vous le poserez sur le sol bientôt même si vous ne le voulez pas. Certainement. Et vous ne le ferez pas pour la raison x ou y, vous le ferez tout simplement parce que vous n’en pourrez plus !...