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Libéralisme économique et structures traditionnelles.

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descriptionLibéralisme économique et structures traditionnelles. - Page 2 EmptyRe: Libéralisme économique et structures traditionnelles.

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Le libéralisme économique et le capitalisme vont de pair dans la mesure où le premier désigne, en très gros, l'indépendance du marché et le second la recherche systématique de la plus-value : le libéralisme économique limite les interventions de l'État et laisse s'épanouir le règne du marché, permettant l'accroissement du capital, l'augmentation de la croissance économique.

L'une des forces du capitalisme est sa mobilité perpétuelle et sa capacité à se développer sans cesse sous de nouvelles formes. De fait, la glorification de la tradition, plus ou moins fausse et fantasmée, en vue d'attirer les bobos et les touristes, est l'une des formes qu'a pris le capitalisme, et notamment en France ; ce qui n'empêche pas certaines traditions de perdurer, certains métiers de persister, même s'ils sont presque toujours obligés de se soumettre à un bas marketing pour subsister. De façon générale, le processus libéral tente d'en finir avec toutes les formes de transmission et cherche, par tous les moyens, à déraciner le peuple puisque, et la transmission et les racines sont des obstacles au fonctionnement optimal de la société de consommation. Les jeunes citoyens d'aujourd'hui sont moins éduqués par leurs parents que par les sottises télévisuelles américaines et autres inventions ignobles du capitalisme mondialisé ; il n'y a plus de profondes transmissions de valeurs entre parents et enfants ; et, de manière générale, l'enfance au XXIème siècle n'a plus aucun rapport avec celle que l'on pouvait vivre encore au début du XXème siècle.

Silentio a écrit:
L'État serait seul responsable de ce que nous reprochons au libéralisme ?

Le libéralisme ne s'est de toute évidence pas déployé tout seul. C'est l'État qui, négativement, en abandonnant son pouvoir souverain sur de multiples domaines essentiels, et, positivement, en cherchant à faire s'épanouir harmonieusement le marché et le droit, a favorisé l'essor du libéralisme. L’État de nos jours, n'est à peu près rien d'autre que le cadre du processus libéral : en somme, il le régule et le contrôle plus ou moins, tout en le laissant suivre sa marche destructrice.

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Euterpe a écrit:
Là vous faites un raccourci périlleux. Comment faites-vous de  l'idéologie néolibérale une conséquence de ce qui précède ?

C'est une représentation fort courante en France. Je m'interroge sur son origine. Représentation qui part du principe que l'échange marchand est "amoral", voire néfaste pour l'Homme, contrairement à d'autres structures traditionnelles (comme la famille, l'école ou l'État) qui - bien qu'elles puissent contraindre - ne seraient que bienveillantes à l'égard des individus.
C'est la distinction entre, d'un côté l'intérêt (qui implique que si c'est à l'avantage de quelqu'un, ça peut aussi être au désavantage d'un autre) et les passions de l'autre (dans le sens où les émotions nous poussent à fréquenter notre prochain et à le protéger spontanément, etc.). Il y a aussi la distinction entre un passé idéalisé ("c'était mieux avant") et le présent où l'on assisterait à l'expansion incessante du lien marchand, cette fois à l'échelle mondiale. Le marché aurait par conséquent de plus en plus de pouvoir ; ce qui irait de pair avec la destruction progressive de toutes les structures traditionnelles (dont la principale serait l'État). Ce qui impliquerait un certain nombre de conséquences : une valeur qui occulterait les autres (c'est-à-dire le "culte de la consommation") et un certain nombre de conséquences néfastes : délocalisations, donc hausse du chômage ; privatisation, etc. Pour justifier cette situation, on parlera d'idéologie "néo-libérale", qui serait "dominante". Toutes ces idées apparaissent souvent comme des métaphores. Comme je l'ai dit, ça fait partie d'une représentation largement diffusée. On la retrouve souvent, en filigrane, dans les débats politiques. La démarcation se ferait entre ceux qui sont favorables au "protectionnisme" et ceux qui sont favorables au "libre-échange".
Je ne sais pas si les intervenants ont compris le sujet que je souhaitais aborder (j'ignore comment le problème s'appelle philosophiquement, s'il porte un nom). J'espère ne pas avoir été trop confus.

Baschus a écrit:
De façon générale, le processus libéral tente d'en finir avec toutes les formes de transmission et cherche, par tous les moyens, à déraciner le peuple puisque, et la transmission, et les racines sont des obstacles au fonctionnement optimal de la société de consommation.

Justement, avez-vous lu les exemples utilisés dans mon premier post qui vont à l'encontre de cette idée ?

Baschus a écrit:
Les jeunes citoyens d'aujourd'hui sont moins éduqués par leurs parents que par les sottises télévisuelles américaines et autres inventions ignobles du capitalisme mondialisé ; il n'y a plus de profondes transmissions de valeurs entre parents et enfants ; et, de manière générale, l'enfance au XXIème siècle n'a plus aucun rapport avec celle que l'on pouvait vivre encore au début du XXème siècle.

Vous sous-entendez que les USA sont, en partie, responsables ?
Sinon, ça me fait penser à Aron qui disait quelque chose comme : "parce que jouer à la belote (à la campagne) rendait plus intelligent ?" Il n'est pas évident que la télévision rende débile.

Hirschman soutient l'idée suivante : sous le régime féodal les individus étaient moins libres car ils ne pouvaient critiquer le système dont ils dépendaient (c'est-à-dire les sujets sous le joug des seigneurs) car il n'y avait pas de séparation entre le politique et l'économique. L'institutionnalisation de la propriété privée a permis, en partie, la libération de l'individu, qui pouvait ainsi remettre en cause le système politique dont il ne dépendait pas exclusivement. Tout ça pour dire que la "croissance économique" peut aussi avoir des effets positifs qui ne sont que rarement soulignés (et dont tout un chacun tire pourtant avantage), contrairement aux inconvénients (supposés) de cette "croissance économique".

descriptionLibéralisme économique et structures traditionnelles. - Page 2 EmptyRe: Libéralisme économique et structures traditionnelles.

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Kthun a écrit:
C'est une représentation fort courante en France. Je m'interroge sur son origine. Représentation qui part du principe que l'échange marchand est "amoral" voire néfaste pour l'Homme, contrairement à d'autres structures traditionnelles (comme la famille, l'école ou l'État) qui - bien qu'elles puissent contraindre - ne seraient que bienveillantes à l'égard des individus.

Nous ne sommes plus au temps du doux commerce que pouvait célébrer un Montesquieu, et lui même eût sans doute été épouvanté des dégâts produits par la liberté du marché ; car ce ne sont pas seulement des civilisations que nous détruisons, avec notre "doux commerce", c'est la planète elle-même.

Kthun a écrit:
Pour justifier cette situation, on parlera d'idéologie "néo-libérale" qui serait "dominante". Toutes ces idées apparaissent souvent comme des métaphores. Comme je l'ai dit, ça fait partie d'une représentation largement diffusée. On la retrouve souvent, en filigrane, dans les débats politiques. La démarcation se ferait entre ceux qui sont favorables au "protectionnisme" et ceux qui sont favorables au "libre-échange".

Pas besoin de parler de néo-libéralisme, le libéralisme ne s'est pas profondément modifié, c'est son processus qui s'est accéléré. Je ne crois pas que ce soient des métaphores : le marché sauvage et impérialiste, dirigé moins par une démocratie que par une oligarchie, ça existe.

Kthun a écrit:
Justement, avez-vous lu les exemples utilisés dans mon premier post qui vont à l'encontre de cette idée ?

Il est clair que la centralisation, processus qui est même antérieur à la république, me semble-t-il, a joué un rôle dans l'uniformisation des différentes coutumes françaises, mais cette uniformisation permettait de créer une unité, une harmonie entre les Français. Je ne crois pas que l'on pourrait parler d'harmonie avec l'uniformisation à l'américaine du monde entier. Mais dans un sens, vous avez raison, puisque, comme je l'ai dit précédemment, le libéralisme ne s'installe pas tout seul, il faut bien que ce soit l'État qui permette, d'une façon ou d'une autre, l'épanouissement de la logique libérale et capitaliste. Un exemple parlant : Luc Chatel a proposé d'enseigner aux enfants l'anglais dès la maternelle, dès leur troisième année : voilà une proposition libérale et mondialiste au possible, qui montre l'idéal de société de ceux qui nous dirigent actuellement.

Kthun a écrit:
Vous sous-entendez que les USA sont, en partie, responsables ?
Sinon, ça me fait penser à Aron qui disait quelque chose comme "parce que jouer à la belote (à la campagne) rendait plus intelligent ?" Ce n'est pas évident que la télévision rend débile.

Les États-Unis, dans la mesure où ce sont eux qui nous infligent cette sous-culture dégueulasse, cette soupe informe et laide qu'on nous conditionne à consommer servilement, sont, en partie, responsables. D'ailleurs ce n'est un secret pour personne que le siège du libéralisme et du capitalisme est, encore aujourd'hui, aux États-Unis.

Votre citation est intéressante. Je pense précisément que jouer joyeusement à la belote avec des compagnons est bien plus enrichissant que de croupir misérablement, comme le prolétaire moderne, le soir, sur un canapé, bouffant des chips devant Secret Story. On ne mesurera jamais assez les dommages causés par l'invention de la télévision dans le tissu social, cette source d'atomisation des citoyens.

Kthun a écrit:
Hirschman soutient l'idée suivante : sous le régime féodal les individus étaient moins libres car ils ne pouvaient critiquer le système dont ils dépendaient (c'est-à-dire les sujets sous le joug des seigneurs) car il n'y avait pas de séparation entre le politique et l'économique.

Maintenant, ô luxe suprême, nous avons l'illusion de la liberté ! Car il ne faut pas se leurrer : dans cette théâtrocratie (le terme est de Platon) le peuple n'a pas le pouvoir, ne décide d'à peu près rien si ce n'est l'apparence que prend le processus libéral : on choisit nos comédiens, nos magiciens. Le prolétaire moderne, lorsqu'il va, avec monotonie, tous les jours à son usine, ne le fait pas en ayant un sentiment de liberté. Marx ne faisait pas que de la provocation lorsqu'il disait que le sort des esclaves antiques était préférable à celui des prolétaires modernes.

descriptionLibéralisme économique et structures traditionnelles. - Page 2 EmptyRe: Libéralisme économique et structures traditionnelles.

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Baschus a écrit:
Les États-Unis, dans la mesure où ce sont eux qui nous infligent cette sous-culture dégueulasse, cette soupe informe et laide qu'on nous conditionne à consommer servilement, sont, en partie, responsables. D'ailleurs ce n'est un secret pour personne que le siège du libéralisme et du capitalisme est, encore aujourd'hui, aux États-Unis.

Ce sont les européens qui sont responsables des deux guerres mondiales. Une bonne partie de l'Europe était un champ de ruines suite à la seconde guerre. Bref, fallait-il refuser le financement (et l'influence culturelle qui va avec) des États-Unis, nécessaire à la reconstruction européenne ?

Baschus a écrit:
Votre citation est intéressante. Je pense précisément que jouer joyeusement à la belote avec des compagnons est bien plus enrichissant que de croupir misérablement, comme le prolétaire moderne, le soir, sur un canapé, bouffant des chips devant Secret Story. On ne mesurera jamais assez les dommages causés par l'invention de la télévision dans le tissu social, cette source d'atomisation des citoyens.

D'une part, la télévision ne se limite ni à une seule chaîne, ni à un seul type de programmes (les publics sont différents).
D'autre part, ça peut être tout le contraire, de par la diversité des pratiques sociales : on peut regarder la télévision seul ou à plusieurs. Ce n'est donc pas une activité exclusivement solitaire et abrutissante. McLuhan, dans les années 60, voyait dans l'implantation de la TV dans les foyers quelque chose de bénéfique : le resserrement du lien social entre les générations (une famille qui regarde la TV ensemble, en commentant ce qui s'y passe).

Prônez-vous un retour aux campagnes ainsi qu'un retour en arrière ? Ce qui signifie se débarrasser de droits acquis grâce aux luttes sociales et abandonner le "confort" matériel obtenu en partie grâce à la croissance économique ? Je veux dire, les gens sont bien contents de bénéficier de toute la gamme de produits Apple (c'est ce qu'ils veulent : on ne les a pas menacés afin qu'ils achètent le dernier Iphone).

Baschus a écrit:
Maintenant, ô luxe suprême, nous avons l'illusion de la liberté ! Car il ne faut pas se leurrer : dans cette théâtrocratie (le terme est de Platon) le peuple n'a pas le pouvoir, ne décide d'à peu près rien si ce n'est l'apparence que prend le processus libéral : on choisit nos comédiens, nos magiciens. Le prolétaire moderne, lorsqu'il va, avec monotonie, tous les jours à son usine, ne le fait pas en ayant un sentiment de liberté. Marx ne faisait pas que de la provocation lorsqu'il disait que le sort des esclaves antiques était préférable à celui des prolétaires modernes.

Justement, le même Marx voyait dans le mode de production capitaliste (bourgeois donc) un progrès pour l'Homme ! Pour lui, l'oppression d'une classe par une autre est de tout temps (donc ce n'est pas propre à ce mode de production). De plus, le mode de production capitaliste était, selon lui, supérieur à ceux antérieurs car il était la condition de l'avènement du mode de production communiste.

descriptionLibéralisme économique et structures traditionnelles. - Page 2 EmptyRe: Libéralisme économique et structures traditionnelles.

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Baschus a écrit:
Le libéralisme économique et le capitalisme vont de pair dans la mesure où le premier désigne, en très gros, l'indépendance du marché et le second la recherche systématique de la plus-value : le libéralisme économique limite les interventions de l'État et laisse s'épanouir le règne du marché, permettant l'accroissement du capital, l'augmentation de la croissance économique.

L'affaire n'est pas réductible à de telles simplifications. Les vœux des libéraux français du XVIIIe siècle ne sont pas les mêmes que ceux de leurs cousins anglais de la même période, et ne sont pas non plus les mêmes que leurs successeurs de la Monarchie de Juillet, par exemple. L'économie des libéraux français de la deuxième moitié du XVIIIe siècle est agricole et implique effectivement l'absence de l'État. Mais les libéraux de la Monarchie de Juillet font de l'État un acteur essentiel de l'économie, appliquée cette fois à l'industrie. Or vous ne pouvez faire l'économie des questions de développement et d'industrie. Enfin, c'est moins l'accroissement du capital qui crée des difficultés que son accumulation ou sa concentration.

Baschus a écrit:
De façon générale, le processus libéral tente d'en finir avec toutes les formes de transmission et cherche, par tous les moyens, à déraciner le peuple puisque, et la transmission et les racines sont des obstacles au fonctionnement optimal de la société de consommation.

Vous attribuez une intention à ce qui n'en a pas. C'est quoi le "processus" libéral ? La question de la transmission et des racines est un fantasme aussi vieux que le monde moderne. Vous confondez sans vous en rendre compte libéralisme et démocratie, en attribuant au premier les maux inhérents à la seconde. La question est quasiment toute dans notre satanée passion pour l'égalité. Or parler d'égalité impose, à un moment ou à un autre de la réflexion, de parler de la technique.

Baschus a écrit:
Lorsqu'on considère tous les procédés mis en œuvre pour abêtir le citoyen et le succès de ces procédés, mon propos ne me semble pas exagéré. Notre société (comme les sociétés totalitaires passées et présentes) a fait de la jeunesse son idole : tout est fait pour la jeunesse, pour rester jeune, pour surtout ne pas grandir et ne pas devenir un adulte. S'il y a une chose sacrée dans notre société, c'est bel et bien l'enfant.

Si on ne peut qu'être d'accord avec vous sur la question du jeunisme, vous confondez l'effet et la cause. C'est le jeunisme, conjugué à la technique, dans un délire égalitaire, qui conspire (au sens strictement littéral : il n'y a pas de conspiration...) au capitalisme le plus abject. Je dis bien : au capitalisme, pas au libéralisme, dont il ne reste que des îlots, ou des représentants médiocres. Pourquoi ? Parce que le jeunisme associé à l'argent exacerbe monstrueusement les désirs des uns et des autres, et aggrave la question du pouvoir. Aujourd'hui, c'est la seule obsession de la plupart de nos frères en humanitude : le pouvoir, grand ou petit, dont la forme la plus exaltante, parce que la plus propice à tous les fantasmes les plus débridés et cyniques, est l'argent, et que la technique seule matérialise adéquatement, puisque seule elle dématérialise absolument tout, ou presque, ce qui renforce d'autant plus les fantasmes. Dans les époques pré-techniques, même une grande richesse ne pouvait dissimuler la mégalomanie des uns ou des autres. Le ridicule restait visible. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.

Baschus a écrit:
le marché sauvage et impérialiste, dirigé moins par une démocratie que par une oligarchie, ça existe.

Ce que les libéraux purs et durs ont toujours condamné, faut-il le rappeler ?

Dernière édition par Euterpe le Mar 8 Aoû 2017 - 11:59, édité 3 fois
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