NaOh a écrit:Quoi qu'il en soit je faisais plus précisément allusion à la section III du chapitre d'introduction. La section est intitulée : « Le cogito "préreflexif" et l'être du "percipere" ». Il s'agit des pages 16 à 22, du livre. J'attire l'attention des personnes intéressées sur la page 19 en particulier. Sartre y donne un exemple très éclairant du phénomène de "pré-réflexivité" : le comptage de ses cigarettes.
On pourra lire l'introduction ici.
NaOh a écrit:Enfin, vous m'invitez à prendre garde au "contexte" qui primerait sur tout le reste. C'est une affirmation assez catégorique que je ne suis pas certain de bien saisir. Je m'empresse d'ajouter qu'il faut en effet "contextualiser". Et j'irai jusqu'à dire que ce n'est même pas une "vertu" : c'est une nécessité. Comment comprendre sans cela ? Ceci étant, je ne vois pas pourquoi cela devrait "primer sur tout le reste", et en particulier sur les aspects plus conceptuels des problèmes. Les problématiques historiques et conceptuelles doivent être articulées les unes aux autres, sans qu'il soit besoin d'exclure l'une au profit de l'autre. Si la philosophie n'est pas l'histoire des idées, ce que j'espère sincèrement, alors il est impératif de croiser l'histoire (le temporel et le contingent) et le concept (l'intemporel et le nécessaire).
Cette affirmation n'a rien de catégorique, non. Le contexte détermine la compréhension, vous l'admettez vous-même. On ne dit pas plus, ni moins. Nulle part vous n'avez pu lire qu'il était question d'exclure quoi que ce soit au profit de quoi que ce soit, parce que ce n'est écrit nulle part. Mais vous avez bien lu que le contexte détermine la compréhension.
Ajoutons que vous auriez bien du mal à dire en quoi une approche "historique" ne serait pas conceptuelle ; vous en auriez plus encore à montrer que les concepts se laissent saisir sans les éléments contextuels hors desquels ils restent incompréhensibles — d'ailleurs, qu'est-ce qu'un concept ?
Quelle est la démarche de Sartre ? En quoi la référence à Husserl importe-t-elle ? Quand apparaît la phénoménologie, et pourquoi ? On pourrait multiplier les questions faites pour préparer la lecture du texte auquel vous vous référez. Cela, non seulement n'exclut en rien votre approche "conceptuelle", mais la détermine. Aussi, vous disposez de nombreux fils de discussion, dans le forum du site, où la question des méthodes et des prérequis a été abordée. On ne la reprendra pas dans ce fil, où l'on se contentera de recourir au bon sens, en présupposant, ici, que les hommes changent ; que, s'ils changent, leur condition historique leur est essentielle, constitutive, structurante. Ce qu'on appelle « l'homme grec » n'est pas ce qu'on appelle « l'homme moderne », etc. ; y insister n'est que prudence, parce que beaucoup d'étudiants trop prompts à brûler les étapes se gaussent en prétendant qu'ils tiennent de telles distinctions pour des évidences dont ils ne tiennent pourtant aucun compte dans aucune de leurs réflexions, ce qui n'est pas la moindre de leurs absurdités.
Merci, par conséquent, de nous faire l'économie de l'argument surfait et fallacieux que d'aucuns brandissent, sous couvert d'un vœu pieux (celui de l'articulation de l'histoire des idées — qui ne serait pas encore de la pensée — et des idées elles-mêmes — la "vraie" pensée...) ; cache-misère, le plus souvent, de qui scande son droit à l'expression d'une pensée pour se dispenser de s'occuper de ce qu'il ignore mais qu'il ne devrait pas ignorer s'il souhaitait vraiment et seulement accéder à la pensée qu'il prétend qu'il a : l'histoire — qui lui permettrait d'éviter les anachronismes, les contresens, mais le relativisme aussi bien. Les concepts, ce n'est pas du tout-venant, pas plus que des collections en série.