Portail philosophiqueConnexion

Bibliothèque | Sitographie | Forum

Philpapers (comprehensive index and bibliography of philosophy)
Chercher un fichier : PDF Search Engine | Maxi PDF | FreeFullPDF
Offres d'emploi : PhilJobs (Jobs for Philosophers) | Jobs in Philosophy
Index des auteurs de la bibliothèque du Portail : A | B | C | D | E | F | G | H | I | J | K | L | M | N | O | P | Q | R | S | T | U | V | W | X | Y | Z

Qu'est-ce que la philosophie ?

power_settings_newSe connecter pour répondre
+3
Silentio
Euterpe
samok
7 participants

descriptionQu'est-ce que la philosophie ? - Page 2 EmptyRe: Qu'est-ce que la philosophie ?

more_horiz
Aristippe de cyrène a écrit:
Je me posais une question : si Kant détruit la métaphysique, comment se fait-il qu'il parle de métaphysique des mœurs ?

La métaphysique traditionnelle s'occupait d'objets dont Kant montre qu'on n'en peut faire l'expérience, partant, dont on ne peut construire la connaissance, encore moins établir la vérité. C'est ce qu'il appelle les idées de la raison (qui se distinguent des concepts de l'entendement) : le monde, l'âme, Dieu.

La métaphysique traditionnelle est invalidée du point de vue criticiste. Mais Kant opère une "révolution copernicienne" (cf. préfaces à la Critique de la raison pure) : il prend exemple sur les idées mathématiques (qui ont permis à la physique de progresser de manière fulgurante), vraies sans qu'on puisse en faire l'expérience sensible. Les impératifs catégoriques sont à la morale ce que les concepts sont à l'expérience : les premiers ordonnent le divers de la liberté (les actions des hommes) ; les deuxièmes ordonnent le divers de la nature.

Comme les idées mathématiques, les impératifs catégoriques n'ont pas besoin de l'expérience pour être vérifiés. C'est pourquoi la morale kantienne n'en est pas une. Elle est formelle, ne s'occupe d'aucune action en particulier, mais de l'action en général : la liberté. Quoi que je fasse, il faut que mon acte soit inconditionnel, universel, "vrai" (conforme strictement à l'impératif catégorique).

D'où également le basculement du côté des sciences dites anthropologiques, dont l'objet est l'action des hommes (la liberté), sciences qui ne sont pas "morales" (l'histoire, la sociologie, etc., ne sont pas des parties de la métaphysique des mœurs), mais qu'on peut soumettre aux idées de la raison (pour réguler, pour donner un sens directeur, cf. Histoire d'un point de vue cosmopolitique, etc.).

Dernière édition par Euterpe le Sam 23 Juil 2022 - 12:35, édité 2 fois

descriptionQu'est-ce que la philosophie ? - Page 2 EmptyRe: Qu'est-ce que la philosophie ?

more_horiz
Vos termes techniques sont-ils nécessaires ?
Que signifient-ils ?

Dans l'ordre du fil :
- je découvre le mot "herméneutique" : en quoi cela éclaire le propos d'introduire un nouveau mot ? (je peux frapper google mais je n'ai jamais entendu prononcer ce mot)
- après c'est le désordre dans ma petite tête, vos réponses.

S

descriptionQu'est-ce que la philosophie ? - Page 2 EmptyRe: Qu'est-ce que la philosophie ?

more_horiz
Il n'y a aucun terme technique... Herméneutique n'a rien d'un néologisme, il appartient au vocabulaire philosophique et littéraire depuis la Grèce antique. Terme banal, en somme. Il prend de l'importance à partir du XVIIIe siècle et surtout du XIXe (cf. Schleiermacher et Dilthey), pour désigner ceux qui, tenant compte de l'héritage kantien (plus de vérité métaphysique, etc.), et à l'heure où on parle de raison historique (le XIXe siècle invente l'histoire moderne, et tout le monde s'y met), pensent que le travail consiste désormais à interpréter le monde. On est passé de la question de la vérité à celle du sens.

Dernière édition par Euterpe le Sam 23 Juil 2022 - 12:38, édité 3 fois

descriptionQu'est-ce que la philosophie ? - Page 2 EmptyRe: Qu'est-ce que la philosophie ?

more_horiz
C'est décourageant votre réponse, je ne comprends pas.

S

descriptionQu'est-ce que la philosophie ? - Page 2 EmptyRe: Qu'est-ce que la philosophie ?

more_horiz
De Platon et Aristote jusqu'à Kant, pour l'essentiel, la philosophie, c'est de la métaphysique (cf. l'ontologie, la question de l'être). La connaissance de l'être, conçu de surcroît comme un tout, impliquait l'accès à la vérité (la vérité de l'être). Il n'y avait pas de philosophies concurrentes comme on l'entend aujourd'hui : les philosophes prétendaient se corriger les uns les autres en se complétant les uns les autres. Le but était d'achever l'œuvre entreprise par Platon et Aristote, achever l'œuvre métaphysique, l'œuvre philosophique.

L'échéance a toujours été repoussée pour des raisons historiques ou scientifiques qui importent peu ici, ce retard prolongé ayant contribué à la "durée de vie" de deux millénaires de la philosophie traditionnelle, la métaphysique, autrement dit le système complet de la connaissance du monde (je rappelle que jusqu'au XVIIIe siècle, la science est non seulement subordonnée à la philosophie, mais constitue l'une des principales disciplines philosophiques). Kant tire les conséquences définitives de ce qu'on avait déjà commencé à constater quelque temps avant lui : les sciences progressent, et à mesure qu'elles progressent le noyau strictement métaphysique de la philosophie ne progresse pas. Les sciences découvrent chaque jour de nouvelles vérités ; l'objet de la métaphysique se montre de jour en jour plus obscur, incompréhensible, inexistant. Il n'y a plus de vérité en philosophie. La vérité n'est plus que du domaine des sciences. La philosophie ne doit donc plus s'occuper que de la morale, de la politique (cf. les sciences anthropologiques, plus haut). Les sciences s'occupent des faits naturels, empiriques ; la philosophie s'occupe des faits moraux, des faits non empiriques. Désormais, les choses se distribuent comme suit : aux sciences la vérité, au moyen de l'entendement ; à la philosophie la "morale" et les sciences anthropologiques, au moyen de la raison.

Or le XIXe siècle fut le siècle de la raison historique et de la "raison" scientifique. D'un côté les interprètes du monde et de l'être (herméneutique, etc.), de l'autre les scientifiques, qui dévoilent chaque jour de nouvelles facettes du monde.

edit :
Je l'avais formulé autrement ailleurs :
Euterpe a écrit:
l'avènement de la philosophie correspond à un moment de crise quant à la vérité, quant à la possibilité de dire le vrai (cf. langage), seul moyen, croyait-on jusque là, d'accéder à l'être (d'où l'admiration et la pratique des mathématiques chez Platon, puisque la géométrie par exemple ne se discute pas, dévoilant des vérités qui semblent immuables). Quand Socrate arpente les rues d'Athènes, le scepticisme et le doute sont partout. Et Platon trouve sa voie : il invente la philosophie, plus exactement, il invente la philosophie comme quelque chose qui ne peut pas ne pas être la métaphysique (cf. Aristote), littéralement, ce qui est au-delà de la nature (sensible, apparente). Le philosophe regarde en haut, au-delà du monde sublunaire. La métaphysique (ou la philosophie), c'est la science (le discours, la connaissance : le logos), de l'être en tant qu'être, donc de l'être en tant qu'il est ce qu'il est, non en tant qu'il se manifeste sous telle ou telle forme. Dès lors, et pour longtemps, toute métaphysique se voudra le dernier mot de la philosophie, croyant achever la philosophie en la complétant ou en corrigeant celles des prédécesseurs. Jusqu'à Kant (et/ou, d'une certaine manière, jusqu'à Heidegger). Kant, et c'est la deuxième fois, après les présocratiques, sépare la philosophie de la science. La science est certaine ; la philosophie (la métaphysique) ne l'est pas, parce qu'elle s'applique à des objets dont on ne peut faire l'expérience (Kant tire les conséquences de l'empirisme). Il confine la philosophie (la métaphysique) dans la sphère pratique, celle de l'action (la morale), et invente la métaphysique des mœurs. Tout ce qui ne relève pas de la morale, les sciences dites anthropologiques, doivent employer les méthodes scientifiques en les appliquant à des objets qui ne le sont pas (histoire, sociologie, psychologie, etc.). Il livre la philosophie à une entreprise d'interprétation (donner du sens aux choses). Et les sciences humaines vont progressivement supplanter la philosophie. Dès les premières années du XIXe siècle, il est devenu évident que penser, c'est penser l'histoire.


Dernière édition par Euterpe le Sam 23 Juil 2022 - 12:40, édité 7 fois
privacy_tip Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
power_settings_newSe connecter pour répondre