Ah ! ça devient enfin intéressant et ça commence à prendre de la consistance.
gaz a écrit: vous dites par exemple dans cette dernière remarque que "rien n'est moins naturel que l'interrogation philosophique".
Et pourtant moi, je pense que c'est peut-être la seule vertu que la nature nous a donnée du fait même de la conscience du temps qui passe.
A quoi servirait d'avoir un passé et un futur si ce n'est de se pencher dessus ?
jean ghislain a écrit: C'est ce que dit Heidegger à propos de la conscience du temps : il mène à l'angoisse, et c'est cette même angoisse qui nous fait réfléchir sur notre vie
Là, nous avons bien affaire à une "porte" ouverte sur la philosophie. Toutefois, la conscience du temps qui passe n'est pas la même pour tous : pourquoi y en a-t-il que ça rend philosophes, et pas les autres ? - Contentons-nous, pour lors, de le formuler ainsi : pourquoi la conscience du temps qui passe fait-elle surgir la pensée, chez les uns, mais le déni du réel chez les autres ? - Allons plus loin : pourquoi la conscience du temps qui passe fait-elle des uns des angoissés (pas d'angoisse, pas de pensée), mais pas les autres ?
gaz a écrit: Vous vouliez deux notions artistiques qui serviraient d'exemples : un tableau, et en opposition les copies ou même pour aller plus loin, le poster de ce tableau.
Nous ne parlons pas de la même chose. Vous parlez des œuvres et des copies ; je parle des idées artistiques, de l'inventivité, technique ou pas : l'invention de la perspective, l'organisation du tableau, sa composition...
gaz a écrit: Quant au terme que j'ai employé : "certitude commune de conception", il est vrai que ces mots sont un gros résumé de ma pensée. Ainsi, je pense que beaucoup de choses ont été créées par l'homme pour l'homme. Après le temps, la faculté qu'il lui fallait pour évoluer était la communication. Mais quand on communique, il faut que l'on se comprenne. Ainsi, le bleu est le bleu pour tout le monde (sauf problèmes), 1 + 1 = 2.
Cette fois c'est plus clair. Vous parlez de ce qui est devenu "commun", évident pour tous, un acquis. Je parle d'autre chose, par exemple des dimensions fractales, de la courbe de Peano, etc., autant d'idées qui sont loin d'être une évidence pour tous.
gaz a écrit: je vous assure que ce savoir m'aide à juger le monde autrement que le commun des mortels influencés par les médias.
Là vous dites quelque chose d'important et de significatif : un savoir qui aide à juger. Voyez comme le savoir dont on parle n'est pas fait pour collectionner des coquillages comme le fait un intellectuel idiot, mais uniquement pour
juger (par vous-même). Là, on se rapproche très nettement de la philosophie. Acquérir un savoir qui aide à vivre, qui fait vivre.
jean ghislain a écrit: Pourtant, je crois que pour quelques-uns (et j'inclue gaz), le questionnement philosophique est bel et bien là. Ce même questionnement qui fait tout remettre en question d'une façon certes primaire mais bien réelle. Pour cela, comme je l'ai dit, nul besoin de lire des auteurs (cela venant plus tard nécessairement). Je vous livre une expérience personnelle : à 6 ans je me demandais si le monde existait ou si je vivais un rêve... c'est le genre de raisonnement que j'espère découvrir dans chaque être qui se pose des questions philosophiques...
gaz a écrit: "Une question ne surgit que d'une expérience", on est bien d'accord. Mais pourquoi surgirait-elle d'une expérience philosophique ?
Là encore, on se rapproche de quelque chose qui a du sens. Il vous manque seulement, à vous deux, un paramètre. L'expérience, vous oubliez qu'elle n'est pas d'emblée philosophique, il faut la convertir en expérience philosophique. Ainsi, jean, quand à 6 ans vous vous posiez votre question, elle n'était pas encore philosophique : elle vous a prédisposé à la philosophie (elle vous a rendu réceptif à, disponible pour). De même, gaz, je crois volontiers que, au moins par la manière dont vous vous interrogez, vous êtes réceptif à la philosophie (et vous faites des remarques qui vont en ce sens). Bref, il se passe quelque chose, une expérience se produit et, cette expérience, n'étant pas en soi philosophique (sans quoi elle le serait pour tous indistinctement), "transforme" une personne, la prédispose, la rend réceptive à la philosophie : l'expérience a ouvert son esprit (comme on ouvre un fruit, ou comme on parle de l'Ouvert, une béance, un gouffre), ce qui implique une douleur, une difficulté, une remise en cause dont on ne revient pas, parce qu'il n'y a plus de retour.
gaz a écrit: Je dis que l'on n'a pas forcément besoin de savoir pour philosopher. Vous dites que sans savoir on ne peut philosopher.
Attention,
je ne réduis pas le savoir au seul savoir livresque. Un savoir qui n'est pas vécu ne vaut rien (de toute façon l'intellectualisme est insupportable).
Dernière édition par Euterpe le Mar 16 Aoû 2016 - 16:24, édité 2 fois