louispascal a écrit: Désolé, j'essayais d'apporter un point de vue qui ne part pas du fait historique, mais qui va le chercher pour s'en servir. Pourquoi continuerais-je? Vous avez raison et je n'y reviendrais plus.
Après vous avoir lu et relu plusieurs fois, j’ai un peu de mal à vous suivre, même si je partage certains de vos sentiments sur le plan éthique ou axiologique, mais je n’arrive pas à établir véritablement de lien concret entre les motifs de la controverse de Valladolid et ce que vous écrivez à propos de la conscience individuelle et collective. J’ai pris bonne note néanmoins de la théorie de la « dissonance cognitive » du psychosociologue Leon Festinger que je ne connaissais pas.
J’en viens à me demander si ce « détail » dont vous parlez ne serait pas, à vos yeux, l’équivalent de l’« acte manqué » freudien, une sorte de lapsus révélateur d’un conflit refoulé entre désir individuel inconscient d’une part et morale collective de l’autre, ce conflit ne pouvant être résolu que collectivement. Sauf erreur de ma part, votre vocabulaire évoque celui de la psychanalyse : «
remords collectifs », «
aveu collectif », «
culpabilité quasi inconsciente individuellement ».
(Merci également pour votre clin d’œil à propos de la langue & culture basques, puisque
agur signifie en effet « bonjour » en basque).
@ Dienekess :
Votre intuition est la bonne puisqu’il semble bien que Lévi-Strauss ait fait référence à un témoignage
rapporté par un autre historien espagnol.
L’édition « folioplus philosophique » consacrée à
Race et histoire est suivi d’un dossier, avec un bref extrait de
Histoire générale et naturelle des Indes (1556), par Fernandez de Oviedo, qui correspond précisément au passage auquel se réfère Lévi-Strauss : des indiens de l’île de Saint-Jean mirent sous l’eau un jeune espagnol et le noyèrent, puis passèrent trois jours à lui poser des questions et à lui demander de se lever, jusqu’à ce qu’il sente mauvais, mais ils peinèrent à croire qu’il était mort et que les chrétiens pouvaient mourir.
Malgré tout, dans le passage de Lévi-Strauss, que je transcris ci-dessous de façon plus complète, il est question aussi de « deux interlocuteurs qui se donnent la réplique », ce qui n’est pas sans évoquer la controverse de Valladolid.
« L’ethnocentrisme », chapitre 3, Race et histoire a écrit: On va souvent jusqu’à priver l’étranger de ce dernier degré de réalité en en faisant un « fantôme » ou une « apparition ». Ainsi se réalisent de curieuses situations où deux interlocuteurs se donnent cruellement la réplique. Dans les Grandes Antilles, quelques années après la découverte de l’Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d’enquête pour rechercher si les indigènes possédaient ou non une âme, ces derniers s’employaient à immerger des blancs prisonniers afin de vérifier par une surveillance prolongée si leur cadavre était, ou non, sujet à la putréfaction
La citation s'applique aussi aux auteurs. Eunomia.