Thrasymaque a écrit:Liber a écrit:Je ne crois pas. Guéant a dit queVous illustrez la confusion que j'ai explicitée au-dessus entre politique et culture. Une décision politique n'a rien à voir avec la culture. Envahir un pays ne se fait pas grâce à la supériorité d'une culture sur une autre, mais à la supériorité militaire d'un peuple sur un autre. Ce qui nous gêne dans la vision de Guéant est de confondre culture et force brute, comme si c'étaient deux choses identiques.
Je répondais à votre argument suivant, non à la phrase de Guéant :
Les défenseurs des droits de l'Homme adoptent la même logique que l'extrême droite culturaliste qui était opposée à l'intervention en Afghanistan
La "supériorité culturelle" donne ainsi droit à une intervention militaire, on ne sépare plus alors culture et politique. Quel rapport entre le régime de Bachar El-Assad et l'antique Palmyre ? Doit-on rejeter la culture libanaise à cause du Hezbollah ? Etc. Tout cela est stupide. On connait les difficultés politiques pour intervenir militairement (politiquement donc) dans des régions instables, y rajouter une opposition culturelle qui toucherait à la fondation des peuples, à leur raison d'exister, est suicidaire. On a vu ce que ce genre de salmigondis avait donné en Norvège l'été dernier. De plus, on peut se demander si la tâche d'un ministre de l'Intérieur est vraiment de créer le désordre. C'est pour le moins absurde.
Liber a écrit:Le grand mystère : qu'est-ce qu'une culture ? :D Ce que vous entendez par "culture" je le comprends plutôt comme "civilisation".Or la culture est précisément ce qui en l'homme s'élève (et l'élève) au-dessus de la force brute.
Non, j'ai écrit la culture, pas une culture. Qu'est-ce que la culture ? La culture est commune à l'ensemble des hommes, c'est ce qui distingue l'homme de l'animal, pour le dire simplement. On peut ainsi comprendre le titre du livre de Freud : "Malaise dans la culture", traduit aussi par "Malaise dans la civilisation". Ensuite, il y a des cultures, des civilisations. Mais le processus commun de toutes ces cultures ou ces civilisations est la différence homme/animal qui se crée. Toute autre chose sont les valeurs morales qu'on peut attribuer à ces cultures (et intellectuelles, artistiques, etc.).
La Grèce ancienne est une culture (mais là c'est compliqué, il y avait de nombreuses cités avec des régimes différents)
Encore une fois, vous n'avez pas lu la critique que je vous ai adressée. Vous confondez à nouveau politique et culture.
Rome est une culture, la France est une culture, les Papous cannibales sont une culture, et je ne pense pas que toutes se valent.
C'est un jugement moral :
cannibales, droit barbare, avec nos moeurs barbares
Placez-vous alors dans le domaine de la moralité, au lieu de tourner indéfiniment autour du pot.
C'est ce qu'on a tendance à oublier dans nos sociétés ouvertes, surtout en Europe, où on place les droits de l'Homme au fondement de notre "culture", alors qu'une culture c'est précisément ce qui est particulier, ce qui nous différencie de l'extérieur.
Dans ce cas, n'utilisez pas de jugement moral. Par ailleurs, vous êtes relativiste en disant que la culture est ce qui nous différencie de l'extérieur.
Euterpe a écrit:Si Guéant fait de la provocation, du moins ce qu'il dit nous rappelle des "tabous", la part irrationnelle qui commande l'opinion de beaucoup : le relativisme culturel est un de ces dogmes à qui il faut mener la vie dure.
Je voulais rajouter quelque chose à ce que je vous ai répondu plus haut. A supposer que les Papous nous soient inférieurs intellectuellement, n'ayant pas produit toutes nos merveilles artistiques, scientifiques, philosophiques, leurs religions n'ayant pas la complexité des nôtres, que penser du savant qui s'y intéresse davantage qu'à notre culture ? Nous est-il lui-même inférieur ? Ou bien les étudie-t-il à titre de curiosité, comme on fait avec des insectes inconnus ? Dans tous les cas, par la passion qu'il apporte à une pensée étrangère, il la met au même niveau que la nôtre. Se pose aussi à nouveau le problème du jugement moral. Cette étude pourrait être un prétexte à dévaloriser notre culture ou au contraire, à la valoriser. Dans le premier cas, afin de promouvoir un principe d'égalité envers tous les hommes, dans le second, selon une intention proche de celle de Guéant.