Au moins dix années se sont écoulées depuis que j'ai lu les deux livres de Prigogine, et comme je ne suis pas physicien, je n'ai pas gardé le souvenir de ses démonstrations et arguments. Je vous conseille de lire au moins La Nouvelle Alliance, écrit en collaboration avec la philosophe Isabelle Stengers. De mon côté, je vais le relire aussi un de ces jours, afin de retrouver des passages significatifs.
En attendant, je butte sur le problème de m'adresser à un spécialiste de Wittgenstein (en admettant que vous vous considériez comme tel) et de la logique langagière (si je peux utiliser cette expression. Je prends ainsi le risque de vous sembler encore condescendant, si vous avez lu Henri Laborit, médecin-biologiste qui privilégiait une approche physiologique des comportements humains et de la sociologie, et qui utilisait l'expression "logique langagière" d'une façon un peu méprisante, comme "ceux prenant leur domaine d'expertise pour l'alpha et l'oméga de toute réalité", pour reprendre la phrase de pierrepons ici plus haut). Comment expliquer la phrase "Rien n'est écrit d'avance, donc il n'y a pas de vérité définitive" sans étaler l'argumentaire de l'auteur, d'une façon purement logique ? Oserais-je dire que je trouve le rapport de consécution plutôt évident. Ce n'est pas un argument. Je cherche, je cherche, et je ne trouve pas (j'ai dit quelque part que je laissais la philosophie du langage aux philosophes du langage, mais vous me direz peut-être que c'est encore une autre affaire). Oserais-je proposer une analogie ? Non, cela ne vaut pas grand chose, sans doute. Peut-être une citation voisine : "La vie est un mystère à vivre et non un problème à résoudre". C'est de Gandhi, mais ça n'engage que lui, ce n'est pas une démonstration logique. Bref, comme vous le voyez, je patauge dans ce qui me semble davantage une torture mentale qu'un plaisir. Et pourtant je trouve cela évident. Est-ce parce que j'ai lu le livre ?
J'essaie quand même ceci, au risque de vous contrarier : L'expression "tout est écrit" court le monde (peut-être surtout le monde monothéiste) depuis très longtemps. Notre Culture est empreinte d'une sorte de certitude que notre vie est déterminée par la parole divine écrite par les prophètes dans les fameux "livres sacrés". Cette parole détermine une "vérité définitive" : à notre mort, nous irons vivre dans l'au-delà, enfin notre âme, quoiqu'avec la résurrection des corps, on peut espérer mieux, y compris les je-ne-sais-combien de vierges musulmanes dont il faut bien jouir physiquement. Si Hawking, et d'autres physiciens qui croient à "une théorie de tout", pensait que la philosophie disparaitra au profit d'une vision strictement scientifique, je pense que c'est une marque de cette Culture. Mais il remplace la certitude religieuse par une autre certitude : Un jour tout s'expliquera par des équations qui tiendront lieu de "vérité définitive". Qu'est-ce qui nous prouve que ces équations correspondent à "ce qui est écrit d'avance" ? En fait, c'est plus simple : "ce qui est écrit d'avance" = "la vérité définitive". Donc il ne s'agit pas d'un rapport de consécution. C'est juste un effet du scientisme, comme vous dites. Mais cela ne change rien à l'importance des "circonstances actuelles" comme j'écris plus haut. Aujourd'hui, la science fournit la vision du monde qui convient (qui me convient) le mieux, sans la certitude de Hawking. Et la vision de Prigogine est géniale car elle reprend un fait acquis durant les derniers progrès de la science et de la philosophie (Claude Bernard quand il philosophe dans "Introduction à l'étude de la médecine expérimentale", Karl Popper) : les théories scientifiques sont faites pour être remplacées par d'autres théories scientifiques. Il met philosophie et religion au même niveau que la science : devrait-il en être autrement des idées philosophiques et religieuses ?
J'ai perdu mon temps. Il fallait répondre : Je m'suis trompé, m'sieur. J'ai écrit "donc" par erreur. Il faut lire : "Rien n'est écrit d'avance, il n'y a pas de vérité définitive". C'est con. Mais je laisse quand même ce qui est ci-dessus, car je n'aime pas user l'épiderme de mes doigts pour rien.
En attendant, je butte sur le problème de m'adresser à un spécialiste de Wittgenstein (en admettant que vous vous considériez comme tel) et de la logique langagière (si je peux utiliser cette expression. Je prends ainsi le risque de vous sembler encore condescendant, si vous avez lu Henri Laborit, médecin-biologiste qui privilégiait une approche physiologique des comportements humains et de la sociologie, et qui utilisait l'expression "logique langagière" d'une façon un peu méprisante, comme "ceux prenant leur domaine d'expertise pour l'alpha et l'oméga de toute réalité", pour reprendre la phrase de pierrepons ici plus haut). Comment expliquer la phrase "Rien n'est écrit d'avance, donc il n'y a pas de vérité définitive" sans étaler l'argumentaire de l'auteur, d'une façon purement logique ? Oserais-je dire que je trouve le rapport de consécution plutôt évident. Ce n'est pas un argument. Je cherche, je cherche, et je ne trouve pas (j'ai dit quelque part que je laissais la philosophie du langage aux philosophes du langage, mais vous me direz peut-être que c'est encore une autre affaire). Oserais-je proposer une analogie ? Non, cela ne vaut pas grand chose, sans doute. Peut-être une citation voisine : "La vie est un mystère à vivre et non un problème à résoudre". C'est de Gandhi, mais ça n'engage que lui, ce n'est pas une démonstration logique. Bref, comme vous le voyez, je patauge dans ce qui me semble davantage une torture mentale qu'un plaisir. Et pourtant je trouve cela évident. Est-ce parce que j'ai lu le livre ?
J'essaie quand même ceci, au risque de vous contrarier : L'expression "tout est écrit" court le monde (peut-être surtout le monde monothéiste) depuis très longtemps. Notre Culture est empreinte d'une sorte de certitude que notre vie est déterminée par la parole divine écrite par les prophètes dans les fameux "livres sacrés". Cette parole détermine une "vérité définitive" : à notre mort, nous irons vivre dans l'au-delà, enfin notre âme, quoiqu'avec la résurrection des corps, on peut espérer mieux, y compris les je-ne-sais-combien de vierges musulmanes dont il faut bien jouir physiquement. Si Hawking, et d'autres physiciens qui croient à "une théorie de tout", pensait que la philosophie disparaitra au profit d'une vision strictement scientifique, je pense que c'est une marque de cette Culture. Mais il remplace la certitude religieuse par une autre certitude : Un jour tout s'expliquera par des équations qui tiendront lieu de "vérité définitive". Qu'est-ce qui nous prouve que ces équations correspondent à "ce qui est écrit d'avance" ? En fait, c'est plus simple : "ce qui est écrit d'avance" = "la vérité définitive". Donc il ne s'agit pas d'un rapport de consécution. C'est juste un effet du scientisme, comme vous dites. Mais cela ne change rien à l'importance des "circonstances actuelles" comme j'écris plus haut. Aujourd'hui, la science fournit la vision du monde qui convient (qui me convient) le mieux, sans la certitude de Hawking. Et la vision de Prigogine est géniale car elle reprend un fait acquis durant les derniers progrès de la science et de la philosophie (Claude Bernard quand il philosophe dans "Introduction à l'étude de la médecine expérimentale", Karl Popper) : les théories scientifiques sont faites pour être remplacées par d'autres théories scientifiques. Il met philosophie et religion au même niveau que la science : devrait-il en être autrement des idées philosophiques et religieuses ?
J'ai perdu mon temps. Il fallait répondre : Je m'suis trompé, m'sieur. J'ai écrit "donc" par erreur. Il faut lire : "Rien n'est écrit d'avance, il n'y a pas de vérité définitive". C'est con. Mais je laisse quand même ce qui est ci-dessus, car je n'aime pas user l'épiderme de mes doigts pour rien.