Vangelis a écrit:il est faux de dénoncer cette transcendance chez Sartre car chez lui, elle est au cœur de l'être et non pas dans cet autre monde.
Pour Daniel Martin, le libre arbitre est la faculté d'avoir faim sans que des forces ne m'y contraignent, ou de trouver de quoi me nourrir sans que ce résultat soit déterminé par une autre force que moi-même, ou toute autre faculté de pouvoir se déterminer librement par sa seule volonté, sans contrainte d'un tiers ou d'une volonté supérieure.
Sartre, — en croyant en une liberté définie comme un choix mené de façon autonome, — en pensant qu'il existe au cœur de l'être un libre arbitre échappant au déterminisme, — en réfutant l'inconscient de Freud (il reconnaît son existence, mais considère que c'est l'homme qui choisit librement de se laisser terroriser par ses anciens traumatismes), — en considérant l'homme comme libre de choisir son essence, — en voyant l'homme comme le maître unique de son destin, responsable de ses actes, — en étant, enfin, profondément existentialiste, s'oppose au déterminisme.
Pour Sartre, le caractère transcendant (c'est-à-dire échappant aux lois déterministes de la nature) du libre arbitre de l'homme est la conséquence de la manière de fonctionner de sa conscience, du fait que l'existence de l'homme a précédé la formation de son caractère. Il ne prend pas en compte que l'homme est prédéterminé par son inné (génétique), son acquis (mémoire), et le contexte où il vit. Pour Sartre, l'homme est libre de décider ce qu'il veut, cette liberté-là définissant son libre arbitre. Mais l'homme ne peut vouloir que ce qu'il veut, et ce qu'il veut est complètement déterminé par son inné, son acquis et le contexte, qui résulte de contraintes dont il n'est pas maître, le libre arbitre est donc illusoire. (cf. Daniel Martin, Le déterminisme étendu pour mieux comprendre et prévoir). Sartre ne plaçait peut-être pas la source du libre arbitre de l'homme dans un autre plan de la réalité, mais il énonçait un concept échappant aux lois déterministes.
Or, pour un matérialiste, un être vivant est fait de molécules matérielles, soumises aux lois de la physique, de la chimie et de la biologie. Il considère que ses actes, ses transformations (croissance, etc.) et tout ce qui lui arrive pendant sa vie d'être vivant, tout cela est soumis à ces lois de la nature. L'adoption de la doctrine matérialiste adopte nécessairement celle du déterminisme, et verra dans l'homme une machine.
J'espère avoir justifié l'opposition de Sartre au déterminisme et le fait qu'une personne ayant la faculté de libre arbitre serait alors transcendante à la réalité décrite par la doctrine matérialiste. Sartre ne peut pas être matérialiste et croire au libre arbitre, même en plaçant cette transcendance au cœur de l'être, il la place au final dans un monde qui n'est pas régi par les lois naturelles, et qui n'est donc pas matérialiste.
George Martin a écrit:un homme qui posséderait un libre arbitre serait transcendant, il échapperait aux réalités matérielles du déterminisme ; et comme pour un matérialiste, il n'existe rien en dehors du monde matériel, le libre arbitre transcendant est impossible ; c'est donc une croyance humaine irrationnelle.
Vangelis a écrit:parler de liberté uniquement comme un choix est très réducteur de la pensée Sartrienne.
Si vous pouviez prendre le temps de compléter la vision que j'ai de la liberté Sartrienne, je vous en serai reconnaissant.
Vangelis a écrit:De plus, il faut savoir qu'il n'y a pas de liberté chez Sartre sans situation. Or comme dans sa pensée il est impossible d'échapper à la situation, vous conviendrez qu'il ne peut exister chez Sartre cette transcendance dont parle Martin.
Concernant la transcendance, j'ai pu lire ceci :
La transcendance : La phénoménologie avec Husserl, puis l’existentialisme, avec Sartre, mettent l’accent sur le fait que la transcendance, avant de caractériser un au-delà du monde (comme dans la Critique de la Raison pure de Kant), est inscrite au cœur de ce monde, à travers l’intentionnalité, c'est-à-dire la capacité de la conscience de se rapporter à ce qui n'est pas elle, à tendre vers un ailleurs, un au-delà d'elle-même. La conscience du temps (temporalité) est l’expression privilégiée de la transcendance, puisqu'à travers elle est visé le passé qui n'est plus et le futur qui n'est pas encore.
L’intentionnalité : En définissant l’intentionnalité comme le fait que « la conscience est conscience de quelque chose", Husserl veut d'abord montrer que la conscience est une visée et non une « chose pensante » (res cogitans), ainsi que l’avait définie Descartes dans Les Méditations métaphysiques. Étant pure transcendance (voir ci-dessus la signification de ce mot), la conscience ne coïncide jamais avec elle-même ; elle est fondamentalement temporalité, ouverture au passé et au futur. L’intentionnalité implique du même coup la signification, qui dépasse le simple donné. La conscience donne un sens à elle-même et/ou au monde par la façon dont elle se rapporte à ses objets.
Source
Ce qui correspondrait un peu plus à ce que vous vouliez dire je crois, vu qu'on retrouve les expressions "au cœur de ce monde" et "ne coïncide jamais avec elle-même".
Je ne pense pas que George Martin avait cette définition en tête lorsqu'il a écrit la citation, je pense qu'il faut comprendre transcendant comme quelque chose d'une autre nature, ce qui n'est de toute façon pas contradictoire avec la définition donnée ici je pense.