NOU-JE a écrit: C'est de l'idéologie libérale que d'affirmer que l'URSS était communiste.
Moins d'emportement, s'il vous plaît. Tout dépend seulement du côté où vous vous situez. Si on part du principe que dans les faits, le seul communisme ayant été mis en pratique a échoué (ce qui n'a rien d'une interprétation libérale), on en tire certaines conséquences politiques. L'URSS, Cuba, etc., sont-ils une expérience réussie du communisme ? Non. D'un autre côté, personne n'est dupe. Le communisme, tel qu'on le lit, reste attrayant aux yeux de nombreuses personnes. Mais quel communisme ? Et qu'est-ce que le communisme ? La réponse n'est pas du genre de celles qu'on expédie.
NOU-JE a écrit: Les besoins humains ne sont pas naturels. Sauf les besoins naturels nécessaires
Les besoins ne sont pas naturels, sauf les besoins naturels... Le besoin, par définition, est naturel. Quand ça ne l'est pas, ce n'est pas un besoin (ou ça n'est plus un besoin, mais une addiction).
NOU-JE a écrit: Désirs, besoins et facultés relèvent majoritairement de la production. Pas de la nature humaine. Il n'y a du reste pas de nature humaine...
La question du besoin étant résolue, venons-en à celle du désir. Mettez deux personnes en présence, en 1996 comme en 2153 av. J.-C., le désir surgit, inévitablement. Il implique bien une relation (désir selon l'autre, ou désir de l'autre, tout dépend si on adhère ou pas à la thèse de René Girard), mais ce n'est pas une production sociale comme on parle d'une cause extérieure. Les hommes sont des êtres sociaux, au moins en ceci qu'ils naissent d'un homme et d'une femme qui naquirent eux-mêmes d'autres hommes et femmes. De quelque côté que vous regardiez, partout, vous ne voyez que des hommes. Là où il y a un homme, il y a une société. Le désir, c'est l'homme. Et s'il n'y a pas de nature humaine, c'est précisément parce que le désir n'est pas écrit d'avance (contrairement à la "carte génétique" animale), et que l'homme est toujours un être se faisant ; il est celui dont la nature consiste à s'en inventer une. Il n'est que de relire Aristote. Bref, opposer nature et société, c'est une impasse.
NOU-JE a écrit: les bonnes intentions de Staline
Lesquelles, au juste ?
NOU-JE a écrit: Le marché n'est pas non plus la volonté des hommes. Tu a déjà rencontrée la volonté des hommes ? Tu me la présente ? C'est comme quand on dit "la science à dit que ..." Tu me la présente elle aussi ? Présente moi les hommes s'il te plait. Présente moi tout ça, si tu le peux. Ça ne veut rien dire "les hommes". "Les hommes" ne veulent pas.
Du moins, la volonté est beaucoup moins répandue que ne le croient la plupart. Toutefois, dire que le marché n'est pas la volonté des hommes, ça manque d'exactitude. Le marché est le fait des hommes, c'est conscient, c'est voulu, à moins de croire que le propriétaire d'une boutique ne sait pas ce qu'il fait quand il le fait. Le problème est dans la taille du marché, que je peux concevoir (et encore...), mais qu'aucune proportion, aucun critère ne rendent intellectuellement accessible, intelligible, acceptable, au point d'en tenir compte sans difficulté. Le marché, c'est un enchevêtrement de relations, de causes et d'effets dont les tenants et les aboutissants ne sont modélisables que par des spécialistes (effets pervers chez Boudon, etc.). Bref, le marché, c'est une interaction multiple, constante, partout, de sorte que les résultats globaux ne peuvent coïncider avec les objectifs particuliers. C'est aussi vieux que le monde, mais en plus compliqué et en pire. On sait ce qu'on fait ; on ne sait pas ce que fera ce qu'on fait.
NOU-JE a écrit: Non le marché n'est pas né "dès le paléolithique". Là encore c'est de l'idéologie. Durant le paléolithique, y'avait même pas d'Etat ; pas de marchandise telle que les fétiches modernes ; pas de monnaie ; ce n'est encore qu'un socius de la Terre, il n'y a même pas de division dans la société
Si on devait compter le nombre de fois où vous écrivez le mot "idéologie", on n'en finirait pas. C'est un symptôme fréquent des idéologues... Pour le reste, Georges Réveillac sait de quoi il parle, le marché est aussi vieux que le monde. C'est un fait.
Outre les considérations historiques, com
merce signifie mettre en commun la marchandise (pas nécessairement pour la partager, mais pour l'échanger, le "terrain commun" étant la place du marché). Mercredi veut dire jour du marché.
Mercerie vient de
mercier, littéralement, le marchand, celui qui vend des marchandises. La mercatique (qu'on n'emploie que traduit en anglais ! marketing), a trait à tout ce qui est de l'ordre du marché, tout ce qui est mercantile, autrement dit dont le but est d'obtenir le gain d'une vente. Tout ce vocabulaire est antédiluvien, comme la route de la soie... Les ethnologues, anthropologues et autres paléoanthropologues vous offrent des études dans lesquelles vous auriez de quoi piocher. Le commerce est d'autant plus vieux, de surcroît, qu'il est vital pour gérer les tensions, les conflits, tant au sein d'une seule et même communauté qu'entre communautés voisines. Faut-il rappeler que, jusqu'à une époque très récente, le mariage est d'abord et avant tout un commerce, un accord commercial contracté par deux familles ?...
NOU-JE a écrit: que peut dire Aristote de vrai à son époque où la pensée historiciste n'existe même pas ?
Ouille... Hérodote, Thucydide, etc., ça ne vous dit rien ? L'épopée, c'est quoi, du krill en barres ?
Thrasymaque a écrit: Marx n'est pas le seul à parler des classes et des rapports entre classes. Platon parlait des rapports entre "classes" etc. Pour penser les rapports entre le petit nombre et le grand nombre, entre les privilégiés et ceux qui ne le sont pas, entre les riches et les pauvres en tant que classes, on peut mobiliser Marx, mais aussi beaucoup d'autres...
En effet, mais Marx a et conserve ceci d'intéressant qu'il pense le monde en mouvement et que sa faculté à tenir compte des réalités est rarissime et rend des services dont on aurait tort de se passer.
NOU-JE a écrit: Hannah Arendt n'était pas une fantastique lectrice de Marx
C'est une des rares lectrices pertinentes, précisément parce qu'elle est, sinon la seule, du moins l'une des seules, à son époque, à s'affranchir de l'histoire comme déterminisme. Et elle a eu beaucoup de mal à s'imposer, de ce point de vue. On ne peut se dispenser de lire quelqu'un qui a proprement une intelligence historique. C'est une qualité qu'elle avait, comme Marx et quelques autres.
Georges Réveillac a écrit: etticeticettac a écrit: Non le marché n'est pas naturel, j'en veux pour preuve que les Indiens d'Amérique ne connaissaient rien au marché
Naturel ou pas, peu importe. S’il peut être bénéfique, qu’on le garde, sinon, qu’on cherche autre chose. Il me semble cependant que, dès la maternelle, les enfants inventent le commerce : une barre au chocolat contre une petite voiture…
Mais, affirmer que les hommes de la préhistoire ou que les hommes d’autres régions ignoraient le marché, cela fait bondir l’ancien enseignant
d’histoire.
Je crois que ce que voulait dire etticettac est ailleurs. Historiquement, c'est au XVIIIe siècle que s'impose, chez les anglo-saxons, ce qu'on appelle en politique la théorie du marché par opposition à la théorie du contrat. Les deux théories appellent des conséquences juridiques, philosophiques et politiques très différentes. Or, l'un des arguments principaux de la théorie du marché, au XVIIIe, consiste à dire que la théorie du contrat est un sophisme (le contrat suppose le contrat, il n'y a donc pas d'état de nature), tandis que le marché est naturel (du reste, j'ai eu plusieurs fois l'occasion de le souligner ici ou ailleurs, le mot anglais
commerce est un terme social avant d'être un terme économique). Sur ce plan, je pense que etticettac ne voit aucun
e difficulté. Le marché tel qu'il existe aujourd'hui, en revanche, n'est plus comparable avec le marché tel qu'il pouvait exister, non qu'il n'y ait plus de points communs. Il en reste beaucoup (fétichisme, etc.). Mais la monnaie fiduciaire, les banques, la financiarisation, la bourse, la spéculation, etc., tout ça n'existait pas. On a, d'un côté, une économie matérielle ; de l'autre, une économie nettement dématérialisée.