etticettac a écrit:Mais l'homme se résume-t-il à cela, n'est-il qu'un consommateur, un jouisseur ? Nous touchons là le matérialisme des deux idéologies jumelles
Il y a une idéologie communiste, et l'économie soviétique était idéologique, mais le capitalisme est-il une idéologie ? Le capitalisme en tant que système économique s'est développé lentement, il a été idéologisé après être né. Sauf à considérer les mercantilistes, les physiocrates ou même Montesquieu comme des idéologues du capitalisme... Il faudrait aussi qu'on s'entende sur ce qu'est une idéologie.
D'ailleurs on remarque les mêmes symptômes, le communisme a enfanté une élite censée apporter la bonne parole marxiste, aujourd'hui il y a les prêtres du néo-libéralisme qui pareillement vous serinent qu'ils ont la connaissance. Quand quelqu'un élève la voix pour dire qu'on peut peut-être faire autre chose, tout de suite au nom de cette raison, de ce savoir absolu (ce qui est un non-sens, la connaissance scientifique étant toujours partielle et le fruit d'un instant donné) on traite cette personne de folle. Voire quand le gouvernement qu'un peuple a légitimement élu, qu'ils soient de droite (Berlusconi) ou de gauche (Papandréou), on le remplace par un technocrate.
Je suis bien d'accord pour les technocrates et l'abandon du politique. Mais il faut aussi voir que la crise de la dette était prévisible depuis qu'on s'est lancés dedans (la dette), que les économistes libéraux (Ludwig von Mises dans les années 50) l'avaient prévue dès les débuts de l'État-providence alors même que la situation était complètement différente... On peut se demander si on en est arrivés là par "la faute à la fatalité" (la technique nous y a-t-elle conduits inévitablement ?) ou si les politiques sont responsables de la situation. Et puis, quelles sont ces fameuses voix dissidentes ? Celles qui nous disent qu'il faut injecter de la monnaie dans l'économie pour sauver le monde ?
Or ce que nous vivons c'est une crise, mais une crise bien plus profonde. Qui questionne ce monde issu de la révolution industrielle et dont le communisme et le libéralisme sont les deux frères ? Ils nous faut inventer l'après révolution industrielle. Repenser notre rapport au monde. Est-ce que la nature a été donnée à l'homme uniquement pour qu'il l'exploite ?
Le libéralisme n'est pas né de la révolution industrielle... La société industrielle capitaliste occidentale pouvait être qualifiée de sœur jumelle de la société industrielle soviétique. Sinon, le libéralisme et le marxisme sont tous les deux modernes, c'est vrai.
Ce n'est pas la révolution industrielle qui a rendu l'homme exploiteur de la nature. C'est déjà dans la Bible... Voir aussi Descartes qui nous invite à nous rendre "maîtres et possesseurs de la nature". La question est importante, c'est celle de la place de l'homme dans l'univers. Sans parler de l'invention du sujet par les modernes, il faut quand même voir que la philosophie et l'Occident ont toujours été humanistes, l'homme a toujours eu une dignité supérieure, même quand il devait trouver sa place dans le cosmos plutôt que l'organiser comme il le désire (point de vue des Anciens). Dans le Phèdre, Socrate dit que la nature, les arbres et les animaux ne l'intéressent pas parce qu'il ne peut pas discuter avec eux. Aristote place l'homme au-dessus des animaux car il est seul capable de s'intéresser à la justice (cf. le langage). Alors "repenser notre rapport au monde/à la nature", c'est quand même très très ambitieux. Je pense que nos écolo ont partie liée avec la crise de la raison moderne qui redéfinit la place de l'homme dans la nature et lui retire sa position prééminente. On considère souvent aujourd'hui que l'homme n'est en rien supérieur aux autres êtres parce qu'il est doué de raison, mais que les autres êtres vivants se rapprochent de l'homme parce qu'ils souffrent, et qu'ils sont donc susceptibles d'être pris en pitié... Et tout ça à l'ère des droits de l'Homme, c'est étrange. Surtout si l'on met cela à la lumière de Rousseau, pour qui la pitié était ce qui permettait à l'homme de tempérer son égoïsme naturel (l'amour de soi) et le poussait à faire du bien aux autres hommes. :scratch: