Portail philosophiqueConnexion

Bibliothèque | Sitographie | Forum

Philpapers (comprehensive index and bibliography of philosophy)
Chercher un fichier : PDF Search Engine | Maxi PDF | FreeFullPDF
Offres d'emploi : PhilJobs (Jobs for Philosophers) | Jobs in Philosophy
Index des auteurs de la bibliothèque du Portail : A | B | C | D | E | F | G | H | I | J | K | L | M | N | O | P | Q | R | S | T | U | V | W | X | Y | Z

L'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ?

power_settings_newSe connecter pour répondre
5 participants

descriptionL'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ? - Page 5 Emptyà Euterpe

more_horiz

Grand merci pour cette belle mise en page et pour l'intérêt manifesté. J'ai effectivement des difficultés avec l'informatique. C'est à cause de l'âge (79). Plus vraiment de temps à consacrer à ça. Je vais cependant faire un effort. En fait je rédige à part, sur Libre Office puis je fais un copier-coller. Pauvre technique !
Cordialement
Machaon

descriptionL'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ? - Page 5 EmptyRe: L'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ?

more_horiz
Machaon a écrit:
@aliochaverkiev
Plusieurs points.


    1. A la question de Goldo nous avons répondu que chez Kant « l'intuition sensible » n'était pas une connaissance. Ce n'est qu'une réponse partielle. Peut-on dire pour autant qu'elle est une « saisie directe » ? (Le mot saisir est-il dans la CRP ?) « Saisir », est-ce la fonction de l'intuition sensible ? Peut-on saisir directement ? Indirectement ? Plutôt que saisir (verbe très actif), Kant emploie « recevoir, être affecté », affection qui place le sujet en position passive.


A bientôt pour en reparler.
Bien à vous.

L'intuition sensible n'est pas une connaissance en ce sens qu'une connaissance c'est, sur le plan le plus élémentaire, l'adéquation entre la chose représentée et la chose constatée, ce qui est assez trivial (si un individu voit un arbre là ou tous voient une table, il y a un problème de connaissance de données triviales chez un tel individu). Sur un plan plus élaboré une connaissance c'est le fait de prédiquer un sujet, c'est-à-dire la capacité à émettre un jugement au sens kantien du terme que ce jugement soit analytique ou synthétique.

L'intuition c'est le lieu de la réceptivité, je reçois une "impression", je reçois une sensation. Il y a en effet un caractère passif en cela. La sensation est la matière du phénomène, matière mise en forme par les intuitions pures, les formes que sont l'espace et le temps.
A ce niveau nous n'avons encore aucune perception, ce qui a entraîné la critique de Husserl sur le phénomène tel que vu par Kant : au fond nous ne savons rien de ce qu'est le phénomène, puisque toute représentation implique déjà l'intervention de l'entendement. Je ne vais pas rentrer dans ce débat. En effet nous ne pouvons pas même imaginer ce qu'est la sensation, la matière du phénomène, puisque cette matière même, mise en forme dans les formes pures de l'intuition est immédiatement saisie, je dis bien saisie par l'entendement.
Oui le mot "saisie" est employé par Kant. Mais où il y a saisie, action, il y a intervention de l'entendement.
La synthèse de l'appréhension dans l'intuition est action de l'entendement. De quoi s'agit-il ? Pour Kant l'espace et le temps sont continus, ce sont des formes continues, ce qui entraîne aussi la continuité des sensations (la matière du phénomène). 
Jacques Rivelaygue a écrit:
Si tout est continu, si l'instant du temps n'est pas une unité mais une limite, les sensations passent alors les unes dans les autres sans aucun rupture... Dès lors qu'il y a continuité totale, le divers [de la sensation] ne peut être perçu... car tout passe d'une sensation à une autre. On ne peut pas saisir la diversité des choses, ni même la diversité des sensations, si le lieu où elles se donnent - l'espace et le temps - n'est pas constitué d'unités, mais d'infiniment petits passant l'un dans l'autre de façon continue.

Jacques Rivelaygue, Leçons de métaphysique allemande, tome II, page 11, Editions Grasset


Nous touchons là quelque chose de très important : l'opposition entre le continu et le discontinu. Cette opposition fait l'objet d'intenses réflexions par exemple en physique quantique, laquelle institue le discontinu. Mais le continu existe aussi ! Ne serait-ce que dans la théorie mathématique. Je ne vais pas rentrer dans ce champ immense. Mais le continu de la sensation et de sa mise en forme dans l'espace et le temps, d'après Kant, empêche la perception, laquelle a besoin de "fixer" les choses dans un moment qui "dure". La synthèse de l'appréhension dans l'intuition couplée avec la synthèse de la reproduction dans l'imagination a pour but de créer le présent, c'est-à-dire de construire un "moment" non continu, par juxtaposition de moments infiniment petits. Dans toute cette opération, oui, c'est l'entendement qui agit.

descriptionL'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ? - Page 5 EmptyRe: L'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ?

more_horiz
@Aliochaverkiev

Bonsoir. J'avais proposé pour en terminer avec la réponse à Goldo de revenir sur la définition générique de « représentation » en général. Ce que vous dites du continu et du discontinu, du temps qui passe en permanence, de l'absence du présent , votre citation de Rivelaygue avancent à mon avis grandement le travail. Analyser le concept ce n'est en effet pas seulement énumérer les concepts ou intuitions qui le composent, (conscience, retour dans le présent d'événements passés, symbole etc.. ) c'est aussi mettre en évidence la façon dont ils se synthétisent en une « représentation », se structurent, s'organisent en un système dont on apercevrait le sens.

Que contient comme concepts ou intuitions associés le concept de « représentation » ? Ce qu'on y a mis. Pour moi, c'est d'abord la conscience. Une représentation inconsciente chez Kant n'a pas de sens. Pour aller vite, se représenter quelque chose c'est en prendre conscience et réciproquement. C'est ensuite le retour permanent des événements passés ou pensés, dans le présent. Dans l'écoulement continu du temps le présent, sans durée, est inexistant ou insaisissable. D'où la nécessité de  le créer, ce présent, ou de le stabiliser par un éternel retour (c'est presque de la stroboscopie). Je crois que je vous rejoins ici totalement. Re-présenter comme re-mettre au présent. C'est le sens de la représentation au théâtre, le spectacle avec un ou des spectateurs. Le petit théâtre intérieur où "je" est un autre. Le grand théâtre en plein air où chaque séance remet Sophocle au présent. La présence aussi est un concept présent et particulièrement la présence en absence. Le signe. Ceci mis pour cela. Le retour dont on parle ici, c'est le retour du signifiant. Enfin j'y mets le concept de vivant : la représentation n'est pas sage comme une image, elle est active elle agit, elle se modifie, évolue, modifie les autres représentations, elle vit. Rien pour moi ne présente mieux le problème que ce poème :

Supervielle a écrit:
Saisir quand tout me quitte,
Et avec quelles mains
Saisir cette pensée ?
Et avec quelles mains
Saisir enfin le jour,
Par la peau de son cou ?
Le tenir remuant
Comme un lièvre vivant....

Supervielle, « Saisir », in Le forçat innocent.



Bien cordialement

descriptionL'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ? - Page 5 EmptyRe: L'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ?

more_horiz
Machaon,
J'adhère à ce que vous écrivez. Je n'ai pas de critiques ni rien à ajouter. Sinon que vous allez au-delà du sujet d'étude que Kant s'est donné.
A propos des définitions de mots Kant rétorquait que c'était seulement à la fin de la lecture de ses ouvrages qu'il était possible de comprendre le sens des mots. Ce qui, du coup, oblige à une relecture  et même à plusieurs relectures.
A propos du temps, de la constitution du présent, l'approche de Kant est technique à mon avis. Il me semble qu'il tente de décrire le fonctionnement de la pensée humaine. Si la succession des moments a le caractère de la continuité, il est impossible de rien saisir, car toute sensation passe dans une autre sensation immédiatement (la continuité est faite de moments infiniment petits). Le contenu du moment infinitésimal est en effet la sensation, la matière du phénomène, et si le contenant est continu (si la forme a le caractère de la continuité) alors le contenu est lui aussi continu. Il faut donc, pour parvenir à une perception qui dure, qui soit saisissable, constituer un présent, c'est-à-dire rassembler en une durée donnée une infinité de moments. C'est là qu'intervient la deuxième synthèse, la synthèse de la reproduction dans l'imagination. Il faut qu'existe un "endroit" de l'esprit humain où il soit possible de garder en mémoire la totalité de ces moments. Nous emploierions sans doute le mot mémoire aujourd'hui là où Kant utilise le mot imagination. Le mot imagination aujourd'hui est employé pour signifier une création de nouvelles associations. Pour Kant l'imagination n'est pas seulement créatrice, elle est aussi réceptrice de cette totalité d'instants réunis ensemble pour construire le présent.
Vous allez au-delà de Kant en intégrant  le sentiment dans votre appréhension du présent. Vous donnez une extension puisée dans le sentiment à une étude kantienne qui se veut réduite à l'objectivité, à la froideur de l'objectivité.
Amicalement.

descriptionL'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ? - Page 5 EmptyRe: L'intuition sensible chez Kant : connaissance ou saisie directe ?

more_horiz
A propos du mot "représentation".

Dans "Prolégomènes à toute métaphysique future" édité chez Vrin, page 91, Kant écrit ceci :

"Les jugements sont, ou bien simplement subjectifs, lorsque les représentations sont seulement rapportées à une conscience en un sujet et unifiées en elle, ou bien objectives, lorsqu'elles sont unifiées dans une conscience en général, c'est-à-dire du  coup nécessairement".

Ici le mot représentation désigne "quelque chose" dont nous n'avons pas même encore conscience. Du coup nous ne savons pas trop ce que sont ces représentations.

D'où cette remarque de Jacques Rivelaygue, leçons de métaphysique allemande, tome II chez Grasset, page 83 :

"L'unité de la chose perçue n'est donc pas thématisée à ce niveau : Kant ne peut encore le faire, et il doit renvoyer cette unité à l'entendement. Husserl le lui reprochera d'ailleurs : la chose de la perception n'apparait que lorsqu'elle est pensée, et il n' y donc pas de description réelle du perçu".

Kant au demeurant passe, toujours dans les Prolégomènes (même page) du mot représentation au mot perception : "L'expérience consiste dans la connexion synthétique des phénomènes (perceptions) en une conscience".

Ainsi il utilise les mots représentation et perception avant même toute action synthétisante de la conscience.
privacy_tip Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
power_settings_newSe connecter pour répondre